À mi-chemin entre le complément alimentaire et la boisson énergisante, la perfusion de vitamines continue de se développer en France et dans les pays limitrophes grâce à un marketing bien ficelé.

Pour convaincre celles et ceux qui seraient tentés d'y succomber, l'argument est le suivant : s'injecter de la vitamine C (ou autres) permettrait à l'organisme de l'absorber plus rapidement et beaucoup mieux que par voie orale. Mais s'envoyer un shoot de vitamines en quelques minutes est-il vraiment utile ? Le point avec Mélissa Ankri et Alexandra Murcier, Diététiciennes-Nutritionnistes. 

À chaque problème sa perfusion de vitamines

Popularisée par des célébrités américaines ces dernières années, la vitaminothérapie IV (pour IntraVeineuse, ndlr) a été mise au point dans les années 70 aux États-Unis, par le Dr John Myers. Il s’agit le plus souvent d’un mélange de vitamines B, vitamine C, minéraux (magnésium et calcium), d'antioxydants, acides aminés et eau stérile réunis dans une poche de perfusion, administré en goutte-à-goutte dans l'organisme. 

Les promesses de ces cocktails sont multiples : renforcement de l’immunité, anti-jet-lag ou gueule de bois, belle peau, récupération, stimulation de la libido, amélioration du sommeil ou des performances physiques et intellectuelles, réduction du stress et de l'anxiété, détoxication de l'organisme, anti-migraine, anti-stress, anti-fatigue… Bref, anti-tout ce qui peut nous préoccuper. Certaines sociétés proposent également des solutions sur-mesure afin de répondre à plusieurs problématiques en même temps.  

Une prestation encore assez confidentielle en France, proposée essentiellement dans des lieux prisés par une clientèle aisée avec des antennes mobiles, prêtes à se déplacer directement à domicile, dans les hôtels, bureaux et bateaux. Et si la question d'un intérêt pour la santé se pose, l'intérêt financier est quant à lui bien réel pour les entreprises qui les proposent, le prix des perfusions avoisinant la plupart du temps les 300 euros.

Sur les sites de ces prestataires, on joue systématiquement la carte de la sécurité, chacun assurant que le procédé est encadré par un médecin et des infirmières. Un bilan sanguin est également assuré avant chaque injection. Des garanties qui n'en sont peut-être pas, ces informations étant difficilement vérifiables par les client.es et les prestations n'étant pas réalisées dans des cabinets médicaux, mais le plus souvent dans des centres de bien-être ou des lieux privés.

Des perfusions à risque 

Avant de se préoccuper de ce qui va nous être injecté, il faut déjà savoir que la pose d'une perfusion peut être à l'origine de problèmes graves comme une septicémie. Et d'autant plus si celle-ci n'est pas posée par des professionnel.les de santé... Également, si le mélange est administré trop rapidement, la tension artérielle peut chuter, provoquant alors étourdissements et vertiges. 

Et ces fameuses vitamines, peuvent-elles représenter un danger pour notre santé ? "La vitamine B6 trop dosée pourrait endommager toute la périphérie nerveuse et générer des neuropathies périphériques. Ce n'est pas anodin", prévient Mélissa Ankri. Également, un dosage trop élevé de potassium peut entraîner des problèmes cardiaques, rénaux et neurologiques pouvant être fatals. Un surdosage de thiamine (de la famille des vitamines B), peut provoquer une anaphylaxie, une réaction allergique potentiellement mortelle.

"Se complémenter en fer lorsque l'on n'est pas carencé augmente les risques de cancer, d'insuffisance cardiaque et de diabète sur le long terme, il faut donc faire très attention" prévient de son côté Alexandra Murcier. Et d'ajouter "les vitamines et minéraux peuvent accélérer ou ralentir certaines réactions chimiques, ce qui peut entraîner un déséquilibre au sein de l'organisme. Il ne faut pas faire n'importe quoi, bien se renseigner sur le dosage en vérifiant qu'il ne dépasse pas les limites de sécurité, et s'assurer qu'il n'y aura pas de mauvaises interactions. Mais surtout, il faut s'assurer que l'on en a réellement besoin".

En revanche, les vitamines hydrosolubles comme la vitamine C, rapidement évacuées par les urines, ne présentent pas de danger particulier pour la santé.

Un intérêt médical éprouvé pour certaines pathologies 

Si les perfusions de vitamines et autres solutés ne présentent pas de réel intérêt pour les personnes sans problème de santé grave, elles peuvent en revanche être utilisées pour traiter certaines affections médicales dans un cadre hospitalier. "Chez les sujets à risque nutritionnel élevé, les déficits vitaminiques sont très fréquents et une supplémentation préventive peut être souhaitable pour éviter la survenue de manifestations clinico-biologiques", appuie Vidal.fr.

Ainsi, un.e médecin peut préconiser unenutrition parentérale en cas de pancréatite chronique avec stéatorrhée, de maladies inflammatoires chroniques de l’intestin ou d’un syndrome du grêle court. De même, dans le cadre d'une chirurgie bariatrique ou en cas de malnutrition, une prise de polyvitamines peut être envisagée.

Que faire si l'on pense être carencé ?

La première chose à faire si l'on soupçonne une carence est de prendre rendez-vous avec son médecin traitant. Au besoin, un bilan médical, sanguin, alimentaire pourra alors prescrit. 

"Mais si on a une alimentation équilibrée, on couvre normalement tous ses besoins en vitamines et minéraux", rappelle Alexandra Murcier. La diéteticienne-nutritionniste ajoute qu'il peut toutefois être intéressant de prendre certains compléments alimentaires de temps en temps. En cas de fatigue passagère par exemple, on peut faire une cure de magnésium si besoin". La spécialiste ajoute qu'il est également important de "manger le plus varié possible avec des aliments les plus bruts possibles afin de préserver leurs nutriments".