"J’ai eu tellement la flemme de continuer à le faire !".

Cette corvée dont Inès s’est allègrement délestée lors du premier confinement imposé par la pandémie de Covid-19, c’est celle de l’épilation. "Parce que comme on était enfermés à la maison, je ne voyais vraiment pas l'intérêt. Et même après, quand on est 'ressorti' et que les restrictions ont été levées, j'ai eu la flemme de le refaire. C’est quand même une sacrée charge mentale ! Sans compter la douleur de la cire, les coupures du rasoir passé à la va-vite…Ça ne vaut vraiment pas le coup !", clame celle qui, trois ans plus tard, s’est presque complètement libérée de ce rituel de beauté.

Synonyme d’entrée dans la féminité, l’épilation est aussi mise de côté par Alice, 34 ans, qui s’est progressivement lassée de cette règle imposée .

Le rejet d’une injonction chronophage et douloureuse

"Quand on était ado, on se le faisait entre nous en arrachant les bandes de cire, mais une fois adulte, j’ai commencé à trouver ça vraiment pénible ! Et il était hors de question que je paie quelqu'un pour me faire mal sur une zone en plus qui est déjà ultra sensible !", se souvient-elle, évoquant aujourd’hui un non-sujet.

Tu es dans une contrainte perpétuelle vis à vis de ton corps.

Un sentiment que partage Camille, 28 ans, qui elle aussi a voulu s’extirper de ce rapport contraignant à sa pilosité, à la fois douloureux et chronophage. "J'en ai eu marre de m'épiler, de me raser, du temps que ça prenait à chaque fois pour se préparer…. Tu es dans une contrainte perpétuelle vis à vis de ton corps", énumère-t-elle, avant d’avancer un argument de taille qu’elle découvre lorsqu’elle décide d’enfin assumer ses poils longs : "C’est simple, tout le monde s’en foutait". 

"À la plage ? Tout le monde s’en fout"

"C’est arrivé à un moment où j’ai vécu un grand moment de libération sexuelle, avec plusieurs partenaires à droite, à gauche. Et je me suis rendu compte que si je ressemble à une poupée Barbie ou si je suis complètement velue… Ça ne changeait rien du tout pour l’autre !", remarque la jeune femme qui souligne toutefois que l’épreuve du maillot fut un brin inconfortable, moins en raison de la pilosité en elle-même à assumer que les préjugés qui entourent les femmes de son poids.

"C’est à l’époque où j’étais devenue vraiment plus grosse donc je n’étais pas très à l’aise", se souvient-elle, tout en remarquant qu’elle se laissait juger par son propre regard. "Personne ne s'intéressait à ça !".

Je vois leurs regards, ça dure une seconde. Et il n'y a ni jugement, ni malaise.

Un constat qu’Alice fait également auprès de son ancien compagnon, qui se moquait éperdument de savoir si elle était épilée ou non, mais aussi à la plage où les remarques déplacées et les regards réprobateurs ne sont absolument pas légion. "Et puis, régulièrement, je remarque que des copains voient que j'ai des poils sous les bras, sur les jambes et je vois leurs regards, ça dure une seconde. Et il n'y a ni jugement, ni malaise", ajoute-t-elle, précisant qu’elles côtoient des milieux sociaux où la question du poil féminin est largement décomplexée.

Quant à Inès, l’épreuve du maillot n’en fut jamais une, la jeune femme ne portant que peu d’importance au regard d’autrui. "Je me suis rendu compte la première fois que je suis allée à la plage pas épilée et bien…. personne ne te regarde, n’y n’ose t’interpeller parce que tu aurais des poils ! Encore heureux ! Et quand bien même, on s'en fout, tu fais ta vie", clame-t-elle. 

Le regard parfois lourd de l’entourage

C’est finalement le regard de leurs proches que nos témoins ont dû affronter, notamment lorsque leur mère et/ou les femmes de leurs familles se rendent compte que leur progéniture, leur sœur, leur cousine a jeté le rasoir aux oubliettes.

"Je me souviens d'avoir cette conversation avec ma mère qui me disait qu'elle trouvait que les poils, ça faisait négligé et qu'elle trouvait ça surtout pas du tout féminin et sale", confie Camille, qui a alors entamé une longue conversation avec sa génitrice sur le pourquoi du comment des injonctions au corps intériorisé.

De son côté, Inès a préféré balayer les remarques de son entourage d’un revers de la main, certaines proches ayant fait toute une affaire de ce qu’elles appellent son "passage au naturel". "Et quand c’est un homme ou un garçon de mon entourage qui me fait remarquer que j’ai des poils sous les aisselles, je lui fais lever les bras à son tour pour lui faire remarquer que lui aussi en a. Pourquoi je n’aurai pas les mêmes droits que lui ?", soulève-t-elle.

D’autant que toutes revendiquent avoir beaucoup gagné au change, l’arrêt de l’épilation présentant (contre toute attente!) bien plus d’avantages que d’inconvénients, aussi bien sur le plan physique que psychologique.

Arrêter de s'épiler : un corps à soi

"Grosso modo, j’ai moins de problèmes de peau, notamment de sécheresse au niveau des jambes et moins de petits désagréments au niveau du maillot. Et globalement j’ai un rapport plus naturel, plus évident avec mon corps", décrit Camille, qui a également fait le choix de ne plus porter de soutien-gorge.

De son côté, Alice ne s’astreint plus qu’à une seule épilation par an, généralement en hiver, moins par pression sociale que volonté de confort. "Avoir des poils est devenu quelque chose de complètement naturel pour moi ! Même si j’ai effectivement la chance d’avoir une pilosité relativement peu fournie !", reconnaît-elle.

Les poils appartiennent au corps de la femme et qu’il n’y a aucune raison de les enlever !

Quant à Inès, ne plus s’épiler lui a permis de savourer certains petits plaisirs simples, comme celui de "sentir le vent caresser ses poils sur ses jambes", mais aussi son imaginaire autour de la féminité, en réconciliant tout simplement cette dernière avec le fait d’avoir des poils.

"J’ai rencontré pas mal de femmes qui m’ont donné des représentations différentes de ce que devait ou pouvait être une femme. Et c’est là que je me suis rendu compte que les poils appartiennent au corps de la femme et qu’il n’y a aucune raison de les enlever !", s’exclame-t-elle. Pas même le fait d’aller à la plage ou à la piscine par une chaude journée d’été !

* Sondage IFOP pour Charles & Co, janvier 2023