"Petit, je ne savais pas ce que c'était une calvitie, donc j'ai demandé à faire un rond comme Zidane. Le coiffeur m'a pris pour un fou." Cette anecdote que le footballeur Kylian Mbappé confiait au micro de Clique en 2017 est bien la preuve queles sportifs sont, consciemment ou non, des icônes de style. Les masses s'inspirent de leur leadership, mais aussi de leur style, qui occupe une place de plus en plus centrale dans leur vie personnelle et même professionnelle.

Jordan, Beckham, Ronaldo... Des athlètes bankable

Les athlètes de haut niveau sont les égéries mode d'aujourd'hui. Mais ce n'est pas une nouveauté, déjà deux décennies qu'ils signent des contrats d'envergure avec de grands horlogers et des maisons de luxe. La raison est simple : ils sont plus influents et bankable que les mannequins.

Quel meilleur exemple que l'empire Jordan, construit par le joueur emblématique des Chicago Bulls Michael Jordan et la marque Nike dès 1984 ? Les paires de baskets Jordan habillent tous les pieds — même ceux de modeux-euses qui n'ont jamais entendu parler du basketteur. Selon Forbes, au cours de l'année 2013, Michael Jordan a amassé la modique somme de 90 millions de dollars grâce aux fruits de son partenariat avec l'équipementier sportif américain.

En tant que figure charismatique, l'athlète est le meilleur choix pour mettre en valeur un produit. Notamment les pièces de lingerie pour hommes, un secteur qu'ils ont particulièrement boosté. En 2012, David Beckham prête son corps à la mode. L'ex-star du Real Madrid signe un contrat avec H&M et devient l'égérie de sa collection de lingerie masculine. Cette collaboration est un carton et ses multiples reconduites ne font que le confirmer.

Comme "Becks", le Portugais Cristiano Ronaldo tombe lui aussi la chemise sur les spots publicitaires de son propre label d'underwear intitulé CR7. Bien avant eux, en 2006, ce sont cinq joueurs de la Squadra Azzurra qui posaient en slip pour Dolce & Gabbana.

Les sportifs et les nouveaux standards mode masculins

Dans les années 80, l'ère des culturistes portée par Arnold Schwarzenegger voit grandir la tendance des vêtements souples et du torse nu. Le marcel devient un basique mode chez l'homme, de même que la veste en nylon. C'est aussi à ce moment que sort le blockbuster Rambo (1985), défendu par un héros aux muscles saillants recouverts d'un débardeur noir ultra-moulant.

La décennie d'après, l'allure des joueurs de la National Basketball Association (NBA) inspire monsieur Tout-le-monde. Eux qui ont l'habitude d'enfiler une paire de claquettes avec des chaussettes dans le vestiaire créent sans le savoir un nouveau gimmick mode "pour lui".

Dans les années 2000, les footballeurs et les rugbymans polarisent l'attention autour de la lingerie masculine via de spots publicitaires et des collabs. La figure de l'athlète viril et parfois sanguinaire sur le terrain s'éclipse peu à peu au profit de celle d'un homme particulièrement coquet. La métrosexualité est née. Incarnée par David Beckham ou Lewis Hamilton, elle prend de l'ampleur et s'installe comme un véritable standard qui fait admettre à ces messieurs qu'il n'y a aucun problème avec le fait d'aimer se pouponner.

Ce nouveau canon de beauté n'est pas le seul exemple qui légitime l'influence des sportifs sur les choix vestimentaires des hommes. Là où les défilés de mode impactent directement le dressing des femmes, car ils dictent les collections des marques grand public, les sportifs forcent les hommes à repenser leur définition du menswear. Un secteur que certains grands noms ont transformé en véritable terrain d'expression. Illustration.

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Lewis Hamilton, un militant dans la mode

Abaca

Total look en jean rose, costume à imprimé tartan all-over ou kilt écossais. Sir Lewis Hamilton a le don de savoir tout porter et tout oser. Et il saisit chaque occasion pour le démontrer. Rare pilote noir sur les pistes, il n'hésite pas à faire passer des messages par le biais de ses tenues de courses.

C'était le cas en novembre 2021, lorsqu'il a arboré un casque aux couleurs du drapeau LGBT lors d'une course en Arabie Saoudite. Un pays qui, pour rappel, condamne l'homosexualité, puisqu'elle est passible de lapidation et de sanctions pénales. Le 22 novembre 2021, le mufti d'Arabie Saoudite qualifiait l'homosexualité comme "l'un des crimes les plus ignobles et odieux aux yeux de Dieu".

La mission est, et a toujours été, d'ouvrir des portes pour les jeunes créatifs noirs

Défendre des idées progressistes via le vêtement est une autre manière de faire changer le regard sur l'utilité du vêtement masculin. Au Met Gala 2021, le septuple champion de F1 envoie un nouveau message fort. Il débourse 30 000 dollars pour que les designers Theophilio, Kenneth Nicholson et Jason Rembert puissent assister au très sélect gala américain. "Ces créateurs de mode méritent ce moment autant que les autres designers qui sont conviés au Met Gala. La mission est, et a toujours été, d'ouvrir la voie aux jeunes créatifs noirs."

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David Beckham, le messie du menswear

Getty Images

C'est en quelque sorte le messie de la mode masculine contemporaine. Dans les années 2010, l'industrie du prêt-à-porter se rue sur David Beckham. Le Britannique est nommé égérie des collections sous-vêtements pour hommes de H&M. Plus tard, il devient le visage des collections masculines de l'enseigne.

Celui qui pourrait bien avoir lancé le look métrosexuel décide, en 2018, d'initier sa marque de cosmétiques masculins baptisée House 99. Il devient ensuite ambassadeur de la maison d'horlogerie suisse Tudor.

En plus d'être une légende vivante du football anglais, l'ancien joueur de Manchester United cultive son image de sex-symbol en développant un style particulièrement recherché. Son portfolio d'outfits devient un moodboard dont tous'inspirent. Bref, David Beckham n'a pas volé le titre d'ambassadeur du British Fashion Council qui lui a été attribué en 2018.

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Dennis Rodman, fashion victim invétérée

Getty

Il existe peu de profils comme celui de Dennis Rodman. Avec son attirail pour le moins extravagant, l'ailier des Chicago Bulls était un ovni entouré de coéquipiers au look sobre. Cheveux colorés — multicolore, léopard, vert, blond —, piercings, vernis à ongles, chemise nouée, robes, tops inspirés des nuisettes... L'originaire du New Jersey a été le premier basketteur populaire à s'affranchir des normes de genre malgré le milieu masculiniste dans lequel il évoluait.

Il racontait au magazine GQ en 2021 : "Je crois que j'ai été le premier joueur en NBA qui portait des piercings. À l'époque, on me disait que je m'habillais comme Jimi Hendrix, Jim Morrison ou Robert Page."

Retour aux nineties. À l'époque, il se fait connaître comme un habitué des clubs gays. S'il a souvent été question de savoir s'il appartenait ou non à la communauté LGBT, Dennis Rodman partage en tout cas cet esprit sans limites que certaines personnalités LGBTQIA+ peuvent parfois démontrer grâce à la mode.

Son look le plus marquant ? Certainement la robe de mariée qu'il a arboré lors de la session signature de son livre Bad As I Wanna Be. Bien qu'il ne soit pas la première personnalité noire à avoir adopté un style émancipé de toutes conventions, le basketteur a incité l'opinion publique à repenser sa vision de la masculinité noire. 

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David Ginola, premier footballeur au pays des mannequins

Getty Images

1995. Pour la première fois, une star du ballon rond se retrouve sur le podium d'un défilé. Cette personnalité ? C'est David Ginola

Il foule le catwalk de la célèbre griffe Nino Cerruti. La première pierre de l'idylle entre les footballeurs et l'industrie de la mode est posée, deux milieux qui étaient jusque-là totalement étrangers. Pour David Ginola, cette carrière de mannequin est une forme de renaissance. L'ombre du match France-Bulgarie plane encore au-dessus du Parisien, tenu responsable de la défaite qui a coûté le ticket pour le Mondial 94 aux Bleus.

Mais fraîchement débarqué dans le championnat anglais, il est alors accueilli à bras ouvert par les marques. Cheveux longs, yeux bleus, accent frenchy... Il a visiblement tout pour plaire aux acteurs du luxe. Tant et si bien qu'en 1997, David Ginola devient l'égérie d'un spot publicitaire L'Oréal Paris. Il y vante les bienfaits d'un soin capillaire pour hommes. "Un shampooing L'Oréal pour hommes ? Il était temps !"

Il jongle habilement entre sa carrière footballistique et son nouveau statut de muse. Le natif de Gassin, dans le Var, côtoie dès lors des visages bien connus du microcosme de la mode, à l'instar de Kate Moss, Helena Christensen et Iman. En 1998, il est nommé le visage de la campagne ambassadeur de la Croix-Rouge dans le cadre de sa campagne d'interdiction des mines antipersonnel. Le footballeur obtient ce titre en remplacement de la regrettée Lady Diana disparue quelques mois plus tôt.

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Allen Iverson, pionnier de la génération hip-hop

Instagram

Nom : Allen Iverson. Profession : ex-joueur emblématique des Philadelphia Sixers, puis des Denver Nuggets (entre autres). Statut : icône.

Cette légende des parquets a tout simplement introduit la mode hip-hop dans la NBA au cours des années 2000. S'il existait déjà des basketteurs qui se passionnaient pour ce style, ils se contentaient d'adopter ces codes pendant leurs jours off. Allen Iverson, lui, n'a fait aucune concession : manteau de fourrure assorti à une snapback en conférence de presse, port du durag en bord de terrain, diamants autour du cou et au bout des doigts... En réel trendsetter, il a influencé ses coéquipiers comme ses adversaires.

Vient l'année 2005. Peu de temps après la bagarre générale Malice at The Palace, le commissionnaire de la NBA David Stern impose un code vestimentaire à ses joueurs. Les nouvelles règles en vigueur sont fermes : interdiction de porter des vêtements et des accessoires liés à la culture hip-hop. Exit les chaînes en or, les baggys, les Timberland, à bas les casquettes et les lunettes de soleil. Dorénavant, c'est chemise et costard pour tous, avant et après les matchs et même en interviews.

Le dress code ne reflète pas qui je suis et il m'empêche de m'exprimer

Le surnommé" The Answer" conteste ce protocole et accuse la ligue de racisme. Car au moment où David Stern établit ce dress code, il cherche à balayer l'étiquette de "voyous" que certains spectateur-rice-s ou dirigeant-e-s de franchises veulent coller aux joueurs de cette ligue majoritairement composée d'Afro-américains (74,2 % en 2020 selon les chiffres de Statista). En pointant du doigt la culture hip-hop, le dirigeant s'attaque implicitement aux basketteurs noirs. "Ce n'est pas parce qu'un mec porte un costume qu'il est un type bien. Le dress code ne reflète pas qui je suis et il m'empêche de m'exprimer", protestait alors Allen Iverson.

Ce ne sera pas la seule fois où le monde du sport décidera de réglementer la tenue d'athlètes noir-e-s. Et malgré lui, Allen Iverson a mis en lumière les préjugés que certaines personnes pouvaient emmagasiner sur la mode hip-hop.

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Russell Westbrook, l'audacieux

Septembre 2021, Russell Westbrook s'attire les foudres des internautes. En cause ? Deux selfies postés sur son compte Instagram qui montrent le joueur des Los Angeles Lakers habillé d'un cardigan blanc sous lequel il est torse nu et d'une jupe Thom Browne.

"Il fait le dur, mais le mec porte une robe", "Cette photo marque le début de ton déclin. Tu n'as jamais été aussi nul qu'à partir du moment où tu as porté cette robe", "Gay"... Malgré les commentaires haineux, celui qui a pour devise "Why Not ?" continue de faire bouger les lignes. À chaque avant-match, il débarque dans des tenues griffées, impeccables et parfois disruptives.

En 2017, Russell Westbrook publie Style Drivers, un ouvrage dans lequel il explique plus en détails son rapport à la mode. Dans ces pages, le joueur assure que le style représente à ses yeux une "arme psychologique". Une sorte de bouclier de défense contre toutes les critiques dont il fait l'objet. Aujourd'hui, il est possible de contempler ses tenues et celles des autres basketteurs qui ont suivi le mouvement sur les comptes Instagram @nbastyle_in et @nbafashionfits.

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Michael Jordan, l'empereur du footwear

Getty Images

En 1984, quand Michael Jordan signe le contrat de 500 000 dollars par an qui le lie à la marque au swoosh, il est loin d'imaginer que ce partenariat sera l'un des plus lucratifs de l'Histoire. Il faut rappeler qu'à l'époque, Nike n'a pas la cote puisque les grosses têtes de la ligue ne jurent que par la marque Converse, de la légende des Celtics Larry Bird à l'ancien joueur des Lakers Magic Johnson.

D'autant que c'est Adidas qui était parti pour signer Jordan avant que le géant américain ne lui coupe l'herbe sous le pied en proposant un plus gros cachet au rookie. C'est donc aux côtés de Nike que l'ex-numéro 23 des Chicago Bulls a transformé l'industrie de la basket.

Michael Jordan a ouvert la voie pour que Nike laisse Adidas et d’autres concurrents dans la poussière

Paires de sneakers Air Jordan adaptées aux parquets de basket-ball et modèles lifestyle à porter le reste du temps... Très vite, ces tennis sont adoptées par les aficionados de mode streetwear. Et la Jordan s'installe au fil du temps comme un élément fondamental de cette culture qui est aujourd'hui quasi hégémonique.

"[Michael Jordan] a ouvert la voie pour que Nike laisse adidas et d’autres concurrents dans la poussière", déclarait le magazine Forbes en 2020. Alors que la sneaker portant le patronyme de "MJ" est considérée comme un objet de luxe, elle en dit énormément sur le rapport au style de celui qui la porte.

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