Plus de 5% des Français ont déjà banni la viande de leur assiette, selon une étude de l’agence FranceAgriMer, et 12% ont la volonté de franchir le cap d’ici peu, d’après une étude de janvier 2021 menée par Deliveroo. Leur motivation est triple : préserver le bien-être animal, améliorer sa santé et ne pas contribuer à polluer l’environnement, dans la mesure où l’élevage est responsable de 14,5% des émissions de gaz à effet de serre notamment, selon l’Institute for Climate Economics.

Il est bien sûr possible d’adopter une alimentation végétale tout en conservant un bon équilibre nutritionnel, à condition de se renseigner sur les associations d’aliments à privilégier pour ne pas s’exposer à des déficits. Mais le corps peut tout de même subir quelques soubresauts le temps de s’habituer à la nouvelle façon dont vous allez le nourrir car "modifier son alimentation peut perturber le métabolisme", précise le Dr Arnaud Cocaul, médecin nutritionniste coauteur de Végétarien sans carence (éd. Albin Michel).

L'arrêt de la viande transforme le microbiote intestinal

La flore bactérienne qui loge dans nos intestins diffère selon notre régime alimentaire. Celle des végétariens n’est donc pas la même que celle des amateurs de viande. "Un régime carné implique des sécrétions biliaires importantes, explique le Dr Sébastien Demange, membre de la commission Nutrition-Santé de l’Association végétarienne de France (AVF). Par conséquent, la flore est adaptée à ce milieu riche en sels biliaires, ce qui n’est pas le cas du microbiote des végétariens par exemple".

Ces derniers possèdent un microbiote plus abondant, qui est notamment riche en Firmicutes, des bactéries qui fermentent les fibres et sucres végétaux. Arrêter la viande passe donc par une transformation du microbiote. "Celle-ci peut s’amorcer rapidement, dès les premières 24 heures, souligne le Dr Demange. Elle se poursuit ensuite durant deux à quatre mois, selon une étude américaine de l’Université de Harvard.

Un inconfort digestif fréquent mais passager

Le temps que la flore intestinale s’ajuste à ce changement de régime, des ballonnements importants, des flatulences voire même des spasmes digestifs peuvent apparaître. Ces inconforts sont d’autant plus sérieux que l’arrêt de la viande est brutal.

Pour réduire leur intensité, mieux vaut jouer la progressivité en réduisant peu à peu la viande avant de l’exclure totalement. De même, pour ne pas dépasser les capacités de fermentation des bactéries du côlon, il ne faut pas forcer à outrance sur les fibres dans un premier temps.

"Optez au début pour des céréales semi-complètes et des légumineuses à peau fine (pois cassés, lentilles…), conseille le Dr Demange. Après plusieurs semaines, introduisez peu à peu les céréales complètes et les légumes secs à peau plus épaisse comme les pois chiches ou les haricots blancs".

Limitez également dans un premier temps les crudités, ainsi que les légumes riches en fibres fermentescibles, comme les asperges, les topinambours ou les artichauts.

Des carences possibles, quand on arrête la viande

Manger trop de viande accroît l’inflammation du corps et augmente les risques de maladies chroniques dites de civilisation (affectons cardiovasculaires, maladie inflammatoire chronique de l’intestin, cancer du côlon, diabète de type 2…). La supprimer amenuise donc rapidement ces risques.

En revanche, il faut être vigilant à bien équilibrer ses repas végétaux afin de ne pas développer de carences. Un végétarien qui avale suffisamment de calories sous forme de céréales, de légumes secs et de fruits secs (noix, amande…) ne manque théoriquement pas de protéines, estime le Dr Domange. Pour éviter les déficits en fer, susceptibles de survenir suite à l’arrêt de la viande, il ne faut pas lésiner sur les fruits et légumes frais. Riches en vitamine C, ils boostent l’absorption du fer présent dans les lentilles, le tofu ou encore le quinoa. Et gare au thé qui freine son assimilation. Consommez-le à distance des repas.

Le principal écueil à éviter est le déficit en vitamine B12. Indispensable au bon fonctionnement du cerveau, cette vitamine est en effet principalement apportée par les produits carnés. Les réserves du foie permettent de tenir plusieurs mois, voire plusieurs années, mais les stocks finissent par s’épuiser. Et manger des produits laitiers, de la levure de bière ou beaucoup d’algues suffit rarement à combler le manque. Il faut donc se supplémenter (idéalement 10 µg par jour) pour garder la santé.