C'est la même rengaine tous les six mois : le changement d'heure vient chambouler notre horloge interne.

Au réveil de ce 30 mars 2025, il faudra donc bien penser à remettre nos pendules à l'heure : dans la nuit du samedi (29 mars) au dimanche, à 2h du matin, il sera 3h. En effet, pour adopter l'heure d'été, on avance nos montres. En clair : nous perdons une heure de sommeil, mais nous gagnons une heure de luminosité. 

Une habitude instaurée depuis le choc pétrolier de 1975, après lequel le gouvernement français de l’époque décide d'"aligner les heures de travail sur les heures d'ensoleillement, afin de faire des économies". Mais si ces fluctuations seraient salvatrices pour la planète, quid de notre santé ? 

Dr. Armelle Rancillac, chercheure en neurosciences à l'Inserm et au Collège de France, nous explique tout ce qu'il se passe dans notre corps, quand vient le moment de changer d'heure

Une horloge interne chamboulée 

Premier constat : le changement d'heure n'influe pas que sur nos horloges décoratives, mais aussi (et surtout) sur notre rythme intérieur. 

"Notre horloge interne donne un rythme à tout l'organisme. Lorsque nous dormons, par exemple, nous avons des 'fenêtres' de sommeil, où il sera particulièrement récupérateur, car les synthèses et libérations hormonales s'y font. Au moment du changement d'heure, nous allons dormir en décalage et il va nous falloir un peu de temps pour nous re-régler", commence la chercheuse en neurosciences. 

Forcément, les premiers effets ressentis seront ceux du manque de sommeil : la fatigue et la somnolence diurne sont particulièrement courantes dans les jours suivants le passage à une nouvelle heure. Cette baisse de la vigilance est d'ailleurs liée à un risque accru d'accident de la route, souligne le site du gouvernement

Troubles de l'humeur exacerbés et performances cognitives en berne 

Autres conséquences immédiates du manque de sommeil : les troubles de l'humeur. D'après Dr Rancillac, il n'est pas rare de se sentir plus irritable et plus anxieux après le changement d'heure. "On va moins bien réguler nos émotions", appuie-t-elle. 

En parallèle, notre cerveau est un peu moins performant : "on note une diminution des performances cognitives. La mémorisation est un peu moins bonne, la prise de décision est altérée... Un tout qui diminue globalement notre empathie. Comme nous évaluons moins bien les paramètres externes, nous n'arrivons plus à bien comprendre l'autre", poursuit la chercheuse. 

Du fait de l'affaiblissement du système immunitaire, des perturbations métaboliques peuvent aussi être notées. On va donc moins bien digérer ou avoir un peu plus (ou moins) faim que d'habitude.

Mais ces maux ne seront pas ceux de tous.tes. "Plus l'on va être en dette de sommeil, plus l'on va ressentir tous ces symptômes, et ce, plus ou moins longtemps. Cela peut durer une semaine chez ceux qui y sont sensibles (adolescents, personnes âgées ou malades), alors que cela peut passer totalement inaperçu chez d'autres".

Maladies métaboliques, Alzheimer : quels risques à long terme ?

Au fil du temps et des perturbations de l'horloge interne — qui peut déjà être chamboulée au moment du changement d'heure, les effets s'additionnant alors — d'autres conséquences santé peuvent être observées, d'après Dr Rancillac. 

"On peut voir plus de maladies métaboliques, des prises de poids, des diabètes de type 2, une augmentation des maladies cardiovasculaires (accident vasculaire cérébral, crise cardiaque...)".

Cependant, la spécialiste nuance : si les études menées montrent un lien entre troubles cardiaques et changement d'heure, il concerne généralement des personnes déjà à risque et/ou en dette de sommeil. Nul besoin, donc, de vous inquiéter à l'approche du changement d'heure. 

Exacerbés, les troubles de l'humeur peuvent aussi mener à des dépressions et à de l'anxiété chronique.

Enfin, le déficit de sommeil est également lié à la favorisation de maladies neurodégénératives, comme Alzheimer. "L'une des fonctions du sommeil, c'est de nettoyer son cerveau. Or, si on ne dort pas assez, on ne le 'nettoie' pas assez. Les bêta-amyloïdes s'accumulent, ce qui est précurseur de la maladie d'Alzheimer", explicite l'experte.

Comment bien préparer son corps au changement d'heure ? 

Alors pour éviter ces nombreux désagréments, il est recommandé de préparer son corps et sa psyché, quelques jours avoir d'avoir à recaler montres et horloges. 

"Sur une semaine, on peut décaler ses routines (alimentaire et de coucher) de dix minutes, tous les jours. L'idée n'est pas de se coucher une heure avant la veille du changement d'heure, mais de s'adapter en douceur", conseille Dr Rancillac.

En parallèle, n'hésitez pas à vous exposer à la lumière naturelle, surtout tôt le matin (idéal pour donner un rythme sain à son horloge interne) et à rester bien hydraté.e, pour réduire la fatigue et les maux de tête. Le soir venu, "favorisez les activités zen", puisque le stress n'aide pas à l'endormissement (et qu'il est communicatif, notamment si vous avez des enfants). 

Enfin, faites attention aux niveaux de luminosité et de sonorité de vos appareils connectés, une fois le soir venu. Si vous le pouvez, embrasser la lecture avant de rejoindre les bras de Morphée, plutôt que de scroller sur les réseaux sociaux.