En six ans, les accusations visant Gérard Depardieu n’ont cessé de se multiplier. Propos sexistes, attouchements, viol… Les faits présumés dont il est accusé sont nombreux et n'auraient pas seulement eu lieu sur des plateaux de tournage. Cette affaire est l'un des premiers symboles du #MeToo du cinéma français, et depuis 2019, la parole se libère du côté des accusatrices du "monstre sacré" du septième-art. 

Le procès de Gérard Depardieu, poursuivi pour agression sexuelle sur deux femmes, devait à l’origine avoir lieu en octobre 2024. Reporté en raison des problèmes de santé du comédien, il aura finalement lieu ce lundi 24 mars 2025 et se tiendra sur deux jours au tribunal correctionnel de Paris. 

Accusé d'agression sexuelle sur le tournage des "Volets verts"

Alors que l’homme est déjà accusé par plus de 15 femmes et mis en examen pour viol dans le cadre de la plainte de l’actrice et comédienne Charlotte Arnould, une nouvelle plainte pour agression sexuelle, harcèlement sexuel et outrage sexiste a été déposée contre lui le 25 février 2024. Selon Médiapart, qui a révélé l’information, les faits présumés se seraient déroulés en 2021 sur le tournage du film Les Volets verts. 

Amélie, décoratrice ensemblière, confie au site d’investigation être traumatisée depuis le tournage. La date exacte de l’agression présumée serait le 10 septembre 2021, "dans un hôtel particulier de la rue Mozart, dans le XVIe arrondissement de Paris", indique Médiapart. La plaignante travaillait alors à la mise en place d’un décor dans un couloir lorsque l’acteur se serait placé à côté d’elle et aurait commencé à tenir des propos graveleux. Il lui aurait notamment dit qu’il pouvait faire jouir des femmes sans les toucher et, ce, uniquement avec des mots. Une heure après, l’homme l’aurait "attrapée avec brutalité" et "bloquée en refermant ses jambes sur [elle] comme un crabe".

Il aurait ensuite commencé à lui "pétri la taille, le ventre, en remontant jusqu’à [ses] seins", raconte Amélie au site, ainsi que dans sa plainte. Sidérée et maintenue par l’acteur, toujours selon son témoignage, elle ne serait pas parvenue à partir. Les gardes du corps du comédien seraient ensuite arrivés : "[Ils] l’ont emmené. Il hurlait et riait tout seul. Il m’a lancé : 'On se reverra, ma chérie !' J’étais stupéfaite, secouée. Cela n’a duré que quelques instants, mais cela résonne encore", se souvient-elle. Au total, six personnes ont confirmé cet épisode de violence.

Sarah (nom anonyme), troisième assistante réalisatrice, n’a, elle, pas porté plainte, mais elle dénonce également une agression sexuelle, plus précisément des "attouchements à la poitrine et sur les fesses". Les faits se seraient déroulés le 31 août 2021 dans les loges du comédien : "Je ne m’y attendais pas, car ça se passait plutôt bien, il était lourd, mais il ne me draguait pas… J’ai passé la soirée de tournage à avoir la boule au ventre." Après ces deux dénonciations de violences sexuelles, des excuses de Gérard Depardieu auraient été demandées.

Garde à vue et convocation au tribunal

À la suite de cette plainte, le parquet de Paris a pris la décision d’ouvrir une nouvelle enquête. C’est dans ce contexte que Gérard Depardieu est placé en garde à vue le 29 avril 2024. Interrogé par la police, l’homme a dû répondre à des accusations d’agressions sexuelles, d’après les informations de BFMTV.

Le parquet de Paris précise que c’est après cette journée d’audition que l’homme a reçu "une convocation devant le tribunal correctionnel". Le jugement concerne deux femmes qui auraient été toutes les deux victimes d’agressions sexuelles sur le tournage du film Les Volets verts en 2021.

Report du procès et recours de la défense

Alors que le procès de Gérard Depardieu devait initialement avoir lieu le 28 octobre 2024, ce dernier a été repoussé au 24 mars 2025, car la santé de l’acteur ne lui permettait pas d’y assister. Depuis ce report, Le Parisien a révélé le 11 janvier dernier que l’homme, ainsi que ses avocats, ont déposé des recours concernant certains éléments de l’enquête, contestant notamment le témoignage d’une figurante.

La défense demande la nullité – l’invalidité d’un acte juridique ou d’une procédure – de ce dernier, qui avait été recueilli par Médiapart et plus tard par les enquêteurs. Selon la femme, Gérard Depardieu aurait glissé sa main sous sa robe lors du tournage de Big House (2015), réalisé par Jean-Emmanuel Godart. "Il a essayé d’écarter ma culotte et de me doigter [...]. Si je ne l’avais pas arrêté, il aurait réussi", se remémorait-elle auprès du média d'investigation.

Le second recours déposé par les avocats de Gérard Depardieu concerne les rushs de l’émission Complément d’enquête : la chute de l’ogre, diffusée fin 2023 sur France 2. Le comédien y est filmé en voyage en Corée du Nord, où il multiplie les propos misogynes et à caractère sexuel, notamment concernant une enfant prenant un cours d’équitation : "Si jamais elle galope, elle jouit", déclarait-il.

Selon les avocats de l’homme de 76 ans, ces images auraient fait l’objet d’un montage frauduleux. Ils auraient saisi la justice civile et enjoint la magistrate en charge des investigations pour viols sur Charlotte Arnould de trancher quant à l’authenticité du montage, précise Le Parisien.

Selon l’AFP, une source proche du dossier aurait affirmé que fin juillet, la juge s’y serait déjà refusée après avoir demandé à France Télévisions et à la société de production Hikari de lui faire parvenir ces images. 

Nouveaux témoignages quelques jours avant le procès

Le 19 mars 2025, à peine quelques jours avant le procès de Gérard Depardieu, de nouveaux témoignages, ont été révélés par Médiapart. Trois femmes l’accusent d’agression et de harcèlement sexuel. Si aucune n’a porté plainte, deux d’entre elles, Aurélie Dauchez et Marie Dalibon, entendent témoigner lors des audiences des 24 et 25 mars prochains au tribunal correctionnel de Paris. 

Aurélie Dauchez, responsable commerciale de 45 ans, explique avoir été victime d’agressions le 21 février 2014, alors qu’elle était vendeuse dans une boutique du Faubourg-Saint-Honoré, à Paris. Selon sa version, confirmée par plusieurs de ses collègues, le septuagénaire lui aurait dit : "Oh mais qu’est-ce que tu m’excites avec ça, on dirait des porte-jarretelles, viens là, je vais te soigner moi." L’accusatrice partage ensuite avec la journaliste de Médiapart les attouchements dont elle aurait été victime : "collé à [elle]", l’acteur aurait mis "son bras gauche autour de [son] cou" tout en "touchant [son] attelle de sa main droite", puis il aurait "remonté sa main sous [sa] robe jusqu’à [son] entrejambe". Elle dit avoir "immédiatement serré les cuisses en tentant de [se] dégager", mais il aurait "réussi à remonter sa main juste avant [son] sexe, sur le collant".

Marie Dalibon, de son côté, a croisé la route de l’acteur en novembre 2007, lors du tournage en Israël de l’émission Deux, trois jours avec moi. Elle aussi témoigne de "propos humiliants à caractère sexuel" et d’attouchements. Le comédien lui aurait "massé le bas du dos" en descendant vers "[sa] jupe et [ses] fesses", "sans [son] autorisation", en ponctuant ses phrases de "râles", toujours selon le témoignage de la journaliste qui l’accuse. Si elle est parvenue à se défaire de cette emprise physique avant que cela n’aille plus loin, elle explique se souvenir des "rires" des personnes témoins de ces scènes.

De nombreuses autres accusations

Cette affaire n’est pas la seule à pointer du doigt les agissements présumés de Gérard Depardieu. Plus de 15 femmes accusent l’acteur. En 2023, une enquête de Médiapart révélait les témoignages de 13 d'entre elles qui témoignaient de violences sexuelles et sexistes. Les faits présumés se seraient déroulés entre 2004 et 2022, sur des plateaux de tournage ou dans des lieux extérieurs. Trois de ces femmes ont apporté leur témoignage à la justice, mais aucune plainte n’a été déposée, certaines expliquant craindre pour leur carrière. 

L'acteur également été mis en examen pour viol, à la suite d’une plainte de la comédienne et danseuse Charlotte Arnould. L’affaire débute en août 2018, lorsque la jeune femme alors âgée de 19 ans porte plainte contre Gérard Depardieu pour viols et agressions sexuelles. Elle accuse l’acteur de l’avoir violée à deux reprises, les 7 et 13 août 2018, dans son hôtel particulier parisien. À l’époque, Charlotte Arnould souffre d’anorexie mentale, une vulnérabilité que l’acteur aurait exploitée.

En juin 2019, le parquet de Paris classe l’affaire sans suite, estimant que les faits ne sont pas suffisamment caractérisés. Cependant, en mars 2020, Charlotte Arnould dépose une nouvelle plainte avec constitution de partie civile, ce qui relance l’enquête. Le 22 août 2024, Gérard Depardieu est officiellement mis en examen pour "viols et agressions sexuelles", indiquait BFMTV. L’acteur nie fermement ces accusations, affirmant dans une lettre ouverte publiée dans Le Figaro : "Jamais au grand jamais, je n’ai abusé d’une femme."

L'affaire des images de Complément d’enquête 

Un reportage signé Complément d’enquête, dédié à Gérard Depardieu, et sous-titré : "La chute de l’ogre", est diffusé le 7 décembre 2023. Les images, tournées en 2018 lors d’un voyage de l’acteur en Corée du Nord, regorgent de misogynie et de propos graveleux à l’égard de femmes, mais aussi d’enfants, comme : "Si elle galope, elle jouit." Yann Moix, qui a tourné ces images, annonce décembre 2023 dans Le Figaro vouloir porter plainte contre son producteur qui a transmis au magazine de France 2 les images.

Celles-ci ont par la suite été "authentifiées" par un huissier de justice. France Télévisions avait alors annoncé qu' "il n’y a aucun doute et aucune ambiguïté sur le fait que c’est bien la jeune fille à l’image qui est ciblée par les propos de Gérard Depardieu".

Plus récemment, le 21 mars dernier, les auteurs de ce Complément d’enquête sur Gérard Depardieu ont pris la décision d’attaquer en justice l’acteur, mais aussi l’écrivain Yann Moix, comme le révèle l’AFP relayée par Le Parisien. "Des citations directes ont été déposées contre Gérard Depardieu et Yann Moix", ont déclaré Emmanuel Tordjman et Joséphine Sennelier, avocats des auteurs du reportage, qui accusent les deux hommes de dénonciation calomnieuse, fausse attestation et tentative d’escroquerie au jugement. Si la date n’est pour le moment pas connue, un autre procès attend Gérard Depardieu.