Il est estimé que chaque femme aura en moyenne ses règles 500 fois dans sa vie (un chiffre qui varie évidemment en fonction de l'âge des premières règles, de leur fréquence et de l'âge de la ménopause). 500 fois, c'est énorme, surtout quand on sait que le syndrome pré-menstruel (SPM), qui se manifeste par des symptômes physiques et psychiques incluant des douleurs, des troubles du sommeil et/ou de la digestion ou l'apparition inopinée de boutons sur le visage, concernerait entre 20 et 40 % des femmes en âge de procréer*.
Et ce n'est pas tout. Sur TikTok, des centaines de femmes affirment se trouver "moches" avant leurs règles et pensent avoir trouvé la raison : ce serait la faute de la phase lutéale, soit la période du cycle menstruel qui arrive immédiatement après l'ovulation.
Véritable coupable ou intox ? On a échangé avec Manon Pilon, CEO de Derme&Co**, auteure, conférencière internationale et spécialiste en dermo-cosmétique, en soins hormonaux de la peau et en cosméceutique intégrative.
Phase lutéale et peau : les hormones responsables d'une augmentation de la production de sébum
"Juste avant les règles, beaucoup de femmes remarquent que leur peau devient plus grasse, que des boutons apparaissent, ou que leurs cheveux regraissent plus vite. C’est tout à fait normal", rassure Manon Pilon. "La seconde partie du cycle menstruel, la fameuse phase lutéale, s'accompagne de nombreux changements hormonaux. Après l'ovulation, le taux de progestérone monte en flèche. Cette hormone favorise entre autres la production de sébum au niveau de la peau et du cuir chevelu, ce qui peut entraîner des boutons, une peau brillante (notamment au niveau de la zone T) et des cheveux qui regraissent vite."
En parallèle, l'experte indique que les androgènes, soit les hormones "masculines" que nous sécrétons aussi, peuvent avoir plus d'impact à ce moment-là, surtout si la progestérone est en excès, ce qui va aggraver la tendance à l'acné ou aux cheveux gras. Le niveau des œstrogènes, hormones "protectrices" de la peau, commence quant à lui à baisser, ce qui se traduit par une peau parfois plus terne, plus fine et moins résistante à l'inflammation. "Juste avant les règles, œstrogènes et progestérone chutent d'un coup, ce qui rend la peau plus fragile, plus réactive et parfois inflammée", conclut Manon Pilon.
Pourquoi toutes les femmes n'ont-elles pas de boutons ou les cheveux plus gras avant leurs règles ?
De la même façon que nous ne sommes pas toutes touchées par le SPM, nous ne sommes pas toutes égales face aux hormones et leur évolution lors de la phase lutéale : la sensibilité hormonale naturelle de chacune explique que certaines vivent cette période sans constater de changement sur leur peau ou au niveau de leurs cheveux, tandis que pour d'autres, c'est la cata. Mais ce n'est pas tout.
"D'autres facteurs sont à prendre en compte", complète Manon Pilon, "notamment le type de peau ou de cheveux, puisqu'il est clair que les peaux mixtes à grasses sont plus sensibles à ces variations dans la production de sébum. L'hygiène de vie a également son importance : l'alimentation, le stress et le sommeil ont un véritable impact sur notre peau et notre cuir chevelu. Enfin, une routine beauté qui n'est pas adaptée peut aggraver la situation."
Les bons réflexes à adopter pour minimiser les imperfections et éviter d'avoir les cheveux gras avant les règles
Pour limiter l'impact de la phase lutéale sur la peau et les cheveux, Manon Pilon recommande d'alléger ses routines skincare et cheveux et de miser sur des gestes doux pour éviter d'exciter encore plus les glandes sébacées.
Sur le visage, elle préconise un nettoyage matin et soir, "avec un gel purifiant mais non décapant" (= on zappe les produits formulés spécifiquement pour les peaux acnéiques si ce n'est pas notre cas) et une exfoliation une à deux fois par semaine pour désobstruer les pores en douceur (avec un gommage enzymatique, les formules à grains étant trop agressives). Ensuite ? "Un sérum à base de zinc, de niacinamide et/ou d'acide salicylique est parfait pour prévenir les imperfections", assure-t-elle.
On fait suivre d'un hydratant léger et, en cas d'imperfections, on applique localement un soin asséchant à base d'argile ou de tea tree. Pour les cheveux, l'experte recommande d'utiliser un shampoing doux purifiant (idéalement sans sulfate) et de se laver les cheveux 2 à 3 fois par semaine. On profite du lavage pour réaliser un massage du cuir chevelu, à l'aide d'une brosse ou de la pulpe des doigts, afin de bien le nettoyer et d'éviter les racines grasses.
Enfin, Manon Pilon rappelle que la consommation de certains aliments peut aggraver les problèmes de peau, surtout lors de la phase lutéale : les sucres rapides (pâtisseries, soda, pain blanc…) boostent l'insuline et peuvent dérégler les hormones ; les produits laitiers en excès (notamment les fromages gras type raclette, camembert…) peuvent stimuler l'inflammation et aggraver l'acné hormonale chez certaines femmes ; les aliments ultra-transformés sont riches en graisses saturées et entretiennent un terrain inflammatoire pour la peau ; la caféine en grande quantité augmente le stress et le cortisol, qui peuvent à leur tour stimuler la production de sébum ; et l'alcool déshydrate la peau, surcharge le foie (qui joue un rôle-clé dans l'équilibre hormonal) et accentue les rougeurs et imperfections. Nous voilà prévenues.
* Selon l'Inserm.
** Derme&Co est un groupe canadien de cosmétiques qui commercialise les marques Laboratoires Druide et Nelly de Vuyst.