Jeudi 4 avril 2024 a marqué un tournant dans la lutte contre les PFAS - per and polyfluoroalkyl substances -,  aussi appelés "polluants éternels", que l’on retrouve dans nombreux de nos produits du quotidien dont… certains produits de beauté. Pour la première fois, une proposition de loi visant à interdire la fabrication et la vente de ces produits chimiques ultratoxiques a été votée à l’unanimité par l’Assemblée nationale.  

Si elles sont autant fustigées, c’est que ces substances -  initialement développées dans les années 1940 pour usage militaire et plus largement utilisées dans les années 50 dans les produits du quotidien - sont soupçonnées d’avoir un impact, permanent, sur l’environnement mais aussi de provoquer des effets délétères sur la santé

Mascaras, crèmes anti-âge, gel douche : dans quels cosmétiques sont cachés les PFAS ? 

Dans la liste d’ingrédient, appelée liste INCI, - que l’on trouve généralement au dos de l’emballage d’un produit -, les PFAS peuvent se reconnaître par différentes appellations : 

  • Ptfe ;
  • Perfluorodecalin ;
  • Perfluorononyl dimethicone ;
  • Polyperfluoromethylisopropyl ether ;
  • Methyl perfluoroisobutyl ether ;
  • Perfluorohexylethyl triethoxysilane ;
  • Perfluorohexane ;
  • Polyperfluoroethoxymethoxy difluoroethyl peg phosphate.

Pourquoi les utilise-t-on en cosmétique ? Pour les faire durer plus longtemps, améliorer la finition des produits ou encore préserver la couleur des fards à paupières et des rouges à lèvres. "Il y a beaucoup de substances qui sont des PFAS, commence Laurence Wittner, rédactrice en chef de L’Observatoire des Cosmétiques. Elles peuvent servir d’émulsifiants, de stabilisants, de tensioactifs, d’agents filmogènes, de solvants… Ce qui signifie que l’on peut les retrouver dans tout un tas de produits cosmétiques du quotidien."

La professionnelle précise : "On peut donc en trouver dans la formule d'une crème, d'un gel douche ou encore d'un vernis à ongles." Et ce n’est pas tout. La liste - non exhaustive - compte aussi des mascaras, des traitements anti-acné, des crèmes anti-âge, des rouges à lèvres… Il y en aurait également beaucoup dans le maquillage waterproof. En résumé : ils sont partout.

PFAS dans les cosmétiques : que leur reproche-t-on ?

Considérés comme dangereux, les PFAS sont encore méconnus de la part des scientifiques. À ce jour, seulement quelques études témoignent de la toxicité de ces substances. Une d’entre elles, menée en 2015 par des chercheurs américains, démontre que l’exposition courante aux polluants éternels est liée à des perturbations du système immunitaire mais aussi des cancers. Une augmentation du taux de cholestérol, des troubles cardiovasculaires, des effets sur la fertilité et le développement du fœtus, sur le foie et sur les reins ont également été recensés par des études scientifiques, note l’Anses sur son site.

En décembre 2023, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a classé deux des substances considérées comme des PFAS, le PFOA et le PFOS, comme "cancérogène pour l’Homme" et "peut-être cancérogène pour l’Homme". Toutes deux sont déjà interdites en Europe depuis plusieurs années. Toutefois, aucun lien n’a encore été fait avec la pénétration des PFAS dans le corps par des cosmétiques. Pour Laurence Wittner, "nous devrions davantage nous inquiéter de ce qui touche nos aliments, comme les poêles ou les eaux, que de nos produits cosmétiques."

La cosmétique bio, une alternative à considérer pour se protéger des PFAS ? 

Si les PFAS se cachent dans chacun de nos produits du quotidien, comment se maquiller ou même se laver sans crainte ? La réponse se trouverait en réalité dans les cosmétiques naturels et biologiques. "Nous interdisons l’utilisation des PFAS depuis toujours", déclare Nicolas Bertrand, Directeur de Cosmebio, une association encadrant la réglementation de la cosmétique naturelle et bio.

"Nous les avons tout simplement remplacés par des esters d’huiles végétales, une alternative tout aussi efficace et prometteuse que ces autres substances controversées", assure Nicolas Bertrand. Les huiles "estérifiées" sont des dérivées de corps gras naturels, dont l’homme a isolé les différents composants pour n'en garder que certains. Elles sont obtenues selon les principes de la chimie verte.