Le microbiote intestinal, communauté de bactéries, virus et champignons non-pathogènes présents dans notre ventre, se veut comme une carte d'identité : il nous informe sur notre alimentation, notre état de santé et même sur notre psyché.
C'est sur cette base que se sont développés, en pharmacie et dans les grandes surfaces, des tests censés mesurer sa qualité.
Des chercheur.euses ont même mis au point un outil informatique capable de l'analyser : dans cette nouvelle étude publiée dans Nature Communications, en août 2024, l'outil a démontré une précision d'au moins 80% pour différencier les individus en bonne santé de ceux atteints d'une maladie.
Mais bien que ces tests utilisés par les chercheur.euses durant des essais et vendus sur internet et en officine s’avèrent fiables et capables de mesurer la bonne santé de la flore intestinale, ils sont pourtant... inutiles. C'est ce qu'estime Benoît Chassaing, directeur de recherches et responsable d'équipe au sein de l’Institut Pasteur.
Contrôler son microbiote pour connaitre son état de santé
Dès notre naissance, se forme dans nos intestins un écosystème unique, composé de micro-organismes. Des espèces au rôle fondamental, alors qu'elles ont une influence sur de nombreux processus internes du corps.
"Le microbiote aide à digérer les aliments, nous protège contre les bactéries pathogènes. Celui qu'on appelait avant la flore intestinale est très complexe, à la fois dans sa composition - il n'y a pas une seule bactérie présente, mais plusieurs centaines d’espèces différentes - que par sa quantité avec environ 100 000 milliards de bactéries", explique Benoît Chassaing.
L’étude du microbiote intestinal est devenue centrale pour la recherche médicale puisqu'il serait corrélé à de nombreuses maladies.
"Depuis 20, 25 ans, on s'est rendu compte que chez les personnes atteintes d’une pathologie, celles qui ont une maladie inflammatoire comme la maladie de Crohn, la rectocolite hémorragiqueou le diabète de type 2, leur microbiote est différent. Certaines bactéries ont tendance à disparaître, d’autres, dites négatives ou méchantes, à apparaitre", précise le chercheur.
Mais une flore intestinale de mauvaise qualité pourrait aussi induire la survenue de troubles. "Avec d'autres études de laboratoires, on s'est rendu compte que le microbiote est associé au processus pathologique. Il serait à lui tout seul capable d’induire des maladies", reprend l'expert.
Des tests en vente libre aussi fiables qu'en laboratoire
Ainsi, de nombreux tests censés mesurer sa qualité ont été mis au point, et vendus en dehors des laboratoires et des universités.
"Dans la maladie de Crohn, le lien établi avec le microbiote est le plus établi. On connaît aussi un lien avec l'axe intestin-cerveau. Le microbiote jouerait rôle sur l'anxiété, la dépression, le stress. Il y a donc un énorme intérêt du monde médical, de la société, d'analyser le microbiote", continue Benoit Chassaing
Et d'après le chercheur, les tests seraient efficaces pour connaître sa composition : "des études comparatives ont montré qu'ils sont fiables". Ces prélèvements montrent si notre flore intestinale est composée de bons ou de mauvais micro-organismes, et évaluent aussi leur quantité.
"Pour le moment, ce sont des tests d'analyse de sa composition. On regarde quelles bactéries sont présentes. C’est une approche par séquençage. On prend un échantillon de selles, on extrait l'ADN et on voit si les bactéries sont là. On fait une cartographie. Ce qui est fait en labo, c'est ce qui est mis en place dans les tests qu'on peut se procurer à la maison", continue Benoît Chassaing.
"Il n'y aucun intérêt à l'utilisation d’un test individuel du microbiote"
Ainsi, la fiabilité de ces explorations intestinales en vente livre est bien établie. Toutefois, "il n'y aucun intérêt à une utilisation individuelle", précise le chercheur. Car le microbiote fait partie d'un vaste ensemble que compose notre organisme. Et il est propre à chacun.e et évolue.
"À l’échelle d’un individu, on est incapable d’en tirer des informations utiles. Les données ne servent à rien. Même si on sait que certaines bactéries sont importantes pour la santé digestive, sont anti-inflammatoires, il y a des variations entre les individus. Si on a un échantillon sans une étude clinique, ni donnée de la population, on ne sera pas capable de l'utiliser", déclare-t-il.
Finalement, ce diagnostic peut se faire "par simple curiosité", estime l'expert qui le voit surtout comme un produit marketing, qui aide à la vente de produits.
"Le business plan est bien huilé. On vend des tests du microbiote et on dit qu'en fonction du résultat, il faudrait manger ça, prend ce complément. Un produit vendu par la même compagnie. C'est un plan commercial, mais ce n'est pas scientifiquement fondé. Un jour, on sera capable d’utiliser ces analyses, des choses vont se mettre en place. À l’échelle d’un individu, on pourra faire des recommandations. Mais on n'en est pas encore là", conclut Benoit Chassaing.
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