Côté jardin, on connaît toutes les bouquets joyeux de mimosa qui illuminent l’hiver, de février à mars. "On la croit méditerranéenne, mais en réalité cette fleur nous vient d'Australie, dont elle est l’un des emblèmes nationaux, raconte Pierre-Constantin Guéros, parfumeur pour l’agence de création de fragrances Symrise. L’arbre a été introduit sur la Côte d’Azur au cours du XIXe siècle".

Il s’impose d’abord en plante ornementale, au jardin. Comme elle s'hybride très facilement, on voit éclore une multitude de pompons différents sur les collines du sud-est de la France. Petits ou grands, plus ou moins jaunes et orangés… Le mimosa s’acclimate si bien après son introduction qu'il se diffuse vite, jusqu'à se révéler invasif.

"On a donc commencé à l'extraire en absolue pour mieux le maîtriser", relate le créateur. Ses multiples expressions font alors florès en parfumerie et en savonnerie au début du XXe siècle, avec un festival de formules d’eaux de mimosa ou de parfums pour mouchoirs.

Le mimosa, une fleur fraîche à l’odeur amandée

Symbole d’élégance, d’amitié, de tendresse et même de droit des femmes, le mimosa est employé en aromathérapie pour ses vertus apaisantes et relaxantes. Sa fleur fraîche a une odeur poudrée, verte, amandée, qui se distingue nettement de l’absolue employée par les parfumeurs. Obtenue par extraction, cette dernière se révèle alors florale, opulente, solaire.

Ses légères nuances de paille insufflent rondeur et chaleur aux compositions. Selon Pierre-Constantin Guéros, cet extrait concentré est très facilement reconnaissable : "Diffusion, volume… l’absolue de mimosa a sa personnalité. Elle présente deux facettes qui peuvent paraître paradoxales. L'une, triviale ; l'autre, très noble".

Un extrait miellé addictif

Le parfumeur dépeint une note verte aquatique saillante, peu naturelle, qui évoque le concombre ou les feuilles de violette. S’affirme ensuite une note florale très dense. "Avec l'iris, le mimosa est la matière première poudrée par excellence. Miellée et addictive, elle a un côté presque nourrissant qui peut rappeler le lait d'avoine. Si je voulais créer une note sophistiquée de noisette, de noix ou d’amande, j'utiliserais certainement cette absolue", confie le nez qui a signé Walking on Via Fiori Oscuri pour Trussardi. "Le mimosa y illustre les atmosphères riches et aristocratiques des rues milanaises".

En mode comme en parfumerie, il existe des cycles. Celui du mimosa est plutôt long. Il a souvent joué les seconds rôles dans les cœurs floraux, en combinaison avec d'autres fleurs. En cosmétique, on l'a beaucoup associé à la rose, pour créer traditionnellement une sensation poudrée très rouge à lèvres.

"Sa dernière grande époque se situe dans les années 90, avec la vogue des bouquets floraux opulents", retrace Pierre-Constantin Guéros. Et de citer Amarige de Givenchy (1991), Champs-Élysées de Guerlain (1996), Poême de Lancôme (1995). Avec Mimosa pour moi en 1992, L’Artisan Parfumeur est alors l’une des rares maisons à proposer une vision plus naturaliste des pompons duveteux.

Un retour de sa facette plus verte

"Depuis une trentaine d'années, on le trouvait trop poudré, trop lourd, bref, trop rétro, à une époque où l'on avait envie de fraîcheur et de verticalité", poursuit le parfumeur. Mais la roue des fragrances tourne… et le mimosa revient doucement sous une forme totalement neuve, comme en témoigne Crazy Me de Paco Rabanne. La composition d’Aliénor Massenet (Symrise) joue sur la note verte de la petite fleur jaune.

On l'utilise désormais à petite dose. On met le curseur sur sa facette verte que l'on combine avec d'autres notes florales aquatiques ou muguet, pour obtenir des bouquets plus texturés.

"Créer une note florale fraîche aquatique est délicat, car on peut vite friser la sensation synthétique ; intégrer le mimosa permet d’apporter de la naturalité en capitalisant sur sa facette qui rappelle le concombre", analyse le parfumeur. En suivant la même logique, on peut tout à fait l’utiliser dans des parfums masculins.

Le mimosa français à l’honneur

Cette nouvelle expression du mimosa répond aux aspirations du paysage olfactif actuel, friand de notes naturelles et réconfortantes. En quatre ou cinq ans, les parfumeurs se sont réappropriés la fleur aux pompons jaunes : "elle vient parfois d'Inde, parfois du Maroc, mais avec le souci d'utiliser toujours plus de matières premières de chez nous, nous redécouvrons en ce moment le mimosa de France", constate le créateur. Selon lui, la quête de développement durable participe au renouveau de cette matière première. Aujourd'hui, la production française se porte bien.

Sa récolte à Grasse est abondante ; très visuelle, elle invite même au tourisme local. "On peut l'admirer sur le massif du Tanneron, dans l'arrière-pays grassois en février et mars, quand toutes les collines s’habillent d’un jaune somptueux", s’émerveille Pierre-Constantin Guéros.

Toutefois, son rendement est faible, ce qui en fait une matière première très chère. Celui d'Inde est davantage bon marché que celui de Grasse (entre 2000 et 5000 euros la palette). Pour composer avec le mimosa, il faut donc de l’argent. Si sa note florale garde un côté élitiste pour sa dimension texturée typique des parfums riches, la présence de cette fleur solaire reste un garant de qualité.

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Eau de parfum Le Vie di Milano Walking On Via Fiori Oscuri de Trussardi

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Eau de parfum Crazy Me de Paco Rabanne

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Eau de parfum Herba Mimosa Atelier des fleurs de Chloé

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4/10

Parfum Signature Mimosa de Le Couvent Maison De Parfum

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5/10

Eau de toilette Belle de Grasse de Fragonard

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Eau de parfum Sea Mimosa de GAS Bijoux

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Eau de toilette Champs-Élysées de Guerlain

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Eau de toilette Amarige de Givenchy

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Eau de parfum Poême de Lancôme

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Bougie Mimosa de Diptyque

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