L'arrivée du printemps, un déménagement, le début de la nouvelle année... Les occasions de faire le tri dans son placard ne manquent pas. En général, certains vêtements finissent dans un tas "à vendre" en prévision d'une brocante ou sur une plateforme de seconde main. Les autres atterrissent dans la pile "à donner", direction le conteneur le plus proche. Sauf que, et ce n’est pas un scoop, les habits qui y sont déposés ne vont pas forcément là où on le pense !

Parce que souvent, alors que l'on imagine bien faire en remplissant ces bennes postées devant le supermarché du coin, l'on contribue en réalité à transformer cette planète en une décharge toujours plus grande qu’elle ne l’était la veille.

Car en réalité, on contribue, sans le vouloir, à faire de certains pays de l’Afrique de l’Ouest de véritables poubelles textiles à ciel ouvert où s’entassent les déchets vestimentaires et achats compulsifs d’un Occident malade de son consumérisme, le tout au détriment de l’environnement et des habitant-e-s.

Au Ghana par exemple, c’est 70 tonnes de vêtements donnés et invendus qui terminent chaque jour dans de vastes décharges

Au Ghana par exemple, c’est 70 tonnes de vêtements donnés et invendus qui terminent chaque jour accumulées dans de vastes décharges, enterrées dans le sable ou charriées vers les océans. Un coût environnemental qui se double d’un coût humain : les porteuses et les travailleur-euse-s exploité-e-s par cette industrie de la seconde main vivent et travaillent pour des salaires misérables dans des conditions déplorables.

Alors, vous allez nous dire que c’est bien beau de dénoncer, de critiquer et de pointer du doigt ces réflexes d’Occidentaux-ales gâté-e-s, mais, quelle est la solution ? Que fait-on de ces fringues jetées dans des sacs-poubelle suite à un élan de rangement incontrôlé post Marie Kondo ? À qui les donner sans causer davantage de dégâts ?

Donner ses vêtements aux friperies IRL et online

Cela ne vous aura pas échappé : le vintage est à la mode. Des friperies de quartier aux pop-up stores des grands magasins en passant par les e-shops dédiés, la seconde main n’a jamais autant été plébiscitée et valorisée. Une bonne raison d'offrir ses pépites vestimentaires à ces PME de la fripe pour qui ce genre de dons est précieux, qu’il s’agisse du dépôt-vente du village du coin ou de la friperie branchée du quartier.

Il ne s'agit pas seulement des vêtements donnés : c’est tout le contexte qu'il y a autour, la conversation, l’échange humain…

De leur côté, les friperies en ligne telles que Once Again, Modaliste, Prêt à changer ou encore Percentil, proposent, comme le site L’Info Durable le précise, de vendre pour leur clientèle les vêtements qui encombrent leurs placards.

Aucune annonce à rédiger, ni de chronophages textos à échanger ou de rendez-vous hasardeux : les habits sont revendus le plus souvent pour 1 euro symbolique, mais ils auront le mérite d’être réutilisés et de ne pas polluer plus qu’ils ne l’ont déjà fait.

Autre possibilité : reverser à une association l'argent récolté lors de la vente de ses anciens habits.

Donner à ses copines, ses collègues, ses voisines

Pour se débarrasser de ses fringues de façon écoresponsable, le meilleur moyen reste encore de les offrir directement à leur nouveau propriétaire. Le troc est aujourd’hui la solution mise en avant par les associations de lutte contre le gaspillage textile.

Alternative gratuite au shopping compulsif, porte de sortie durable pour les fripes qui ont fait leur temps, l’échange de vêtements entre amies, collègues ou membres d’une même famille permet de renouveler son dressing sans impact sur la planète.

"J’ai découvert ce système en vivant à l’étranger : entre expatriées, nous organisions des apéros au cours desquels nous échangions nos vêtements en bon état... Depuis, je ne peux plus me passer du concept et j’essaie d'orchestrer régulièrement ce genre de troc depuis que je suis rentrée à Paris", raconte Nathalie, 30 ans, adepte du “zéro déchet” et écologiste convaincue.

Une tendance qui monte avec notamment les Free Troc Party organisées par le site paris-friendly.fr ou encore les plateformes de troc en ligne comme France Troc ou Troc Vestiaire.

Donner ses vêtements aux plus précaires

Dans une démarche plus humanitaire, certaines personnes optent pour le don spontané de leurs vêtements, à condition qu’ils soient propres et en bon état.

Membre de leur entourage au budget limité, personne sans-abri ou en précarité financière... Elles sondent leurs besoins pour ne pas les encombrer inutilement avant de leur donner les pièces dont elles disposent.

"C’est ce qui a le plus de sens pour moi : j’agis à mon petit niveau et je sais que j’aurai au moins aidé une personne. Il ne s'agit pas seulement des vêtements donnés : c’est tout le contexte qu'il y a autour, la conversation, l’échange humain… Je préfère prendre du temps à donner mes vêtements de cette façon plutôt que de lâchement balancer mon sac dans un conteneur en me disant que des volontaires ou des gens sous-payés feront le boulot à ma place", explique Jérémy, 29 ans, qui n’hésite pas à organiser des maraudes dans son arrondissement, remettant aux sans-abris qui le souhaitent manteaux et vêtements chauds récupérés auprès de son entourage.

Une manière d’aider directement les plus démuni-e-s, en circuit court en somme, sans passer par une association intermédiaire dont les revenus se font essentiellement via la revalorisation des déchets textiles.

Donner aux bonnes associations et ONG

Pour donner une seconde vie à ses vêtements en aidant celles et ceux qui en auraient le plus besoin, il est possible de se tourner vers des associations caritatives comme la Croix Rouge, le Secours Populaire, le Secours Catholique, Emmaüs ou encore l’Armée du Salut.

Les pièces les mieux conservées seront revendues dans leurs boutiques (quand elles en disposent), tandis que celles qui se contentent d’être propres et en bon état seront données lors d'opérations de distribution.

De son côté, La Cravate Solidaire collecte costumes, tailleurs, chemises et cravates pour les personnes qui n’ont pas forcément les moyens de se procurer des vêtements professionnels.

Enfin, les "Ressourceries", ces structures de réemploi textile peuvent, à l’image des recycleries, reprendre les vêtements de seconde main. Ne pas oublier, non plus, de se rapprocher de sa mairie pour connaître les initiatives locales, privées ou publiques, en la matière.

Donner au Relais ou ne pas donner au Relais ?

Aussi plébiscités que controversés, les conteneurs de don Relais font parfois des sceptiques tout en assurant 55 % de la collecte de vêtements usagés en France, avec quelque 18 000 bennes à travers l’Hexagone. Si l’organisme affilié à Emmaüs fut l’un des pionniers de l'économie solidaire en initiant un modèle de valorisation des déchets textiles permettant de créer des emplois, il contribue toutefois aux décharges gargantuesques de l’Afrique de l’Ouest.

En effet, seulement 6 % des vêtements collectés, ceux en meilleur état, sont revendus à bas prix dans l’une des 70 boutiques "Ding Fring". Le reste termine généralement au Burkina Faso, au Sénégal ou encore à Madagascar, bien que l’argent gagné sur place soit réinvesti localement. Autre problème : sous l’effet de Vinted et de la fast fashion, la qualité des vêtements donnés dans les conteneurs tend à sensiblement baisser, ce qui réduit les possibilités de voir ces habits réutilisés.

Éco-organisme de la Filière textile d’habillement, linge de maison et chaussure, Refashion assure pour le compte de plus de 5 000 entreprises la prise en charge de la prévention et de la gestion de la fin de vie de leurs produits mis sur le marché grand public. Le grand public peut aussi avoir recours à l'un de ses conteneurs, qui reprennent le même concept que ceux du Relais.

"Les vêtements sont triés : la crème va en boutiques de seconde main, le reste est réparti en différents canaux, chiffons pour l'industrie ou matériaux d'isolation", explique Catherine Dauriac, présidente de Fashion Revolution France. "Mais effectivement, c'est parfois opaque car beaucoup de nos vêtements finissent en Afrique…" Vous voilà prévenu-e.

Réparer ses vêtements avant de les donner

Rappelons encore une fois que, peu importe le ou la récipiendaire du don, les vêtements doivent être en état d'être portés, donc ni troués, ni déchirés, mais propres, repassés et pliés. Sans oublier qu'avant d'envisager de s'en séparer, il est possible de réparer les pièces en sa possession. Un pull bouloché ? Un passage de rasoir suffira à le rendre comme neuf. Un jean trop troué ? Deux coups de ciseaux et il se transforme en short estival Un T-shirt en coton rétréci au fil des années ? Il n'attend que quelques points de couture pour se métamorphoser en chiffons ou en lingettes démaquillantes. Bref, il suffit de faire preuve d'un peu d'imagination...