En sept ans, la parfumeur Jacques Cavallier-Belletrud a construit une collection de 32 senteurs pour Louis Vuitton avec une exigence de qualité et de singularité hors-norme. "Quand on cherche à plaire à tout le monde, on ne plait à personne, on fait de la musique d’ascenseur".

En fuyant panels et tendances, en écoutant ses intuitions, en créant des compositions à forte personnalité sans perdre de vue la notion d’équilibre pour que cela plaise et reste confortable sur la peau, il a su imposer de nouveaux classiques magnifiques qui ont déjà leurs fidèles, tels que Ombre Nomade, Orage ou Pacific Chill.

Parmi toutes ces propositions, Les Extraits m’éblouissent particulièrement. Bien sûr, les senteurs sont plus précieuses et onéreuses mais il ose ici une hyper concentration à 30%, stretchant matières et molécules avec grâce pour obtenir des effets inédits et des tonalités jamais senties.

Les sillages sont dingues, de Cosmic Cloud, un ovni de parfum musqué à Rhapsody, un chypré où le patchouli dense est renversant de chic et de modernité ou à Stellar Times, un ambre infiniment lumineux et coloré.

Dans cet univers qui m’émerveille, il propose un 6ème et nouvel opus qui vaut encore une fois le détour. Myriad rend hommage au Oud du Bengladesh. Il revisite cet "or noir" par l’épure mais l’interprète en surdose, ultra puissant et à la diffusion inouïe (qui résisterait à 10 douches selon l’auteur !). Énigmatique et somptueux, il est transcendé par la rose - fraîcheur de l’essence Bulgare puis rondeur de l’absolu de Grasse - et par le cacao, tendrement régressif et pourtant sensuel, tendre, poudré et légèrement animal qui aimante irrésistiblement. Un cocon d’ambrette et de muscs achève cette partition d’un "noir aux milles couleurs".

Le prix (comptez 550 euros pour un flacon de 100ml rechargeable) est à la hauteur de l’œuvre, mais il est à sentir absolument pour être saisi par sa beauté et s’offrir un voyage immobile inoubliable, comme on court admirer un tableau ou un beau film dans une salle obscure.

Du grand art, toujours dans un flacon surmonté d’une coiffe argent sculpturale, telle une fleur imaginaire imaginée par l’architecte Franck Gehry.