Murder, saison 1, épisode 4. Annalise Keating, une brillante avocate et enseignante à l’université - interprétée par Viola Davis - retire sa perruque et son maquillage face à son reflet dans le miroir avant d’aller se coucher. Une scène de vulnérabilité, loin d’avoir été ajoutée par hasard, qui est marquante dans la série puisqu’elle participe à la représentation de la femme noire à l’écran.
Sans maquillage et sans perruque : une scène souhaitée par Viola Davis elle-même
Durant les premières saisons de la série, Annalise Keating porte une perruque courte, coiffure signature du personnage. Dans cette scène intime, le personnage en proie à des problèmes dans sa vie privée se montre sans fard, cheveux naturels, peau démaquillée. Elle fait tomber l’armure qu’elle porte au quotidien dans un milieu élitiste, majoritairement occupé par des personnes blanches, une façon de rappeler que les femmes noires ont encore moins le droit à la vulnérabilité que les autres pour se faire une place dans notre société. Une dualité constante dans laquelle vivent beaucoup de femmes, et notamment les femmes racisées.
Et si cette scène existe, c’est grâce à Viola Davis. "Avant d’avoir le rôle, je me suis dit : ‘Shonda, Pete, Betsy, je ne ferai pas ça à moins de pouvoir enlever ma perruque’, s’est-elle confiée dans une interview à Vulture. L’une des raisons pour lesquelles j’ai arrêté de regarder la télévision, c’est que je ne me voyais pas à la télévision. Je ne parle pas seulement de femme de couleur ou de femme de 49 ans, mais simplement de personne (...) Je voulais montrer qui nous sommes avant de sortir le matin et de mettre le masque de l’acceptabilité – ‘S’il vous plaît, voyez-moi comme une femme jolie, s’il vous plaît, aimez-moi.’"
Pour l’actrice, faire retirer la perruque de son personnage était un moyen de montrer la vulnérabilité du personnage qui se cache derrière le caractère de la "femme forte" et inatteignable et de dévoiler sa personnalité "humaine" que son métier en tant que femme racisée ne lui permet pas de montrer. "J’ai ressenti le besoin de retirer physiquement la perruque. Je n’ai pas de sourcils. J’ai des cils que je mets, et il y avait quelque chose d’extrêmement vulnérable dans cet acte – et je sais que cela semble être un acte très simple au bout du compte – mais pour moi, ce simple acte a vraiment surmonté quelque chose de très puissant au final", a-t-elle ajouté.
Une représentation indispensable pour les femmes noires
Mais au-delà de l’aspect psychologique, si Viola Davis a voulu montrer sa vraie nature de cheveux à l’écran, c’est également pour faire passer un message d’acceptation aux femmes noires qui regardent la série.
"C’est très important les cheveux pour les femmes africaines-américaines. Ça commence quand on est petite fille. Est-ce qu’on les laisse naturels alors qu’ils sont si durs à entretenir ? Est-ce qu’on fait des tresses ? Après on commence à porter des perruques mais tous les soirs avant de se coucher il faut l’enlever et s’occuper de ses cheveux. Et c’est une facette d’Annalise que je voulais voir traitée par les scénaristes parce que je n’ai jamais vu ça à la télévision et je pensais que ce serait très marquant", a-t-elle indiqué dans un entretien au Wall Street Journal.
Une volonté de détruire les standards de beauté à l’écran qui a du faire écho à un grand nombre de femmes puisque cette scène a notamment été saluée par les consoeurs de la comédienne, Halle Berry ou encore Nicole Beharie, qui auraient toutes deux envoyé un message à l’actrice pour la remercier d’avoir osé montrer une scène aussi réaliste à l’écran.