En 2023, le petit univers de la mode fut lui aussi traversé de ses coups d’éclat et crises existentielles, au terme d’une année résolument marquée par beaucoup d’excès et quelques tragédies.
Les excès d’abord, de superstars et autres figures de la pop culture qui font de leurs costumes de scène la vitrine tonitruante de maisons de couture en quête inlassable de buzz viral.
Et quand ce n’est pas pour leurs tournées aux 4 coins du monde, c’est pour les convier à leur show que les Schiaparelli et consorts métamorphosent les idoles de l’époque, quitte à concurrencer les looks défilant sur le podium.
Les excès aussi de marques qui rivalisent d’imagination pour présenter des shows dignes de véritables spectacles, que ce soit Jacquemus qui investit pas moins que les jardins du Château de Versailles ou Pharell Williams, dont le premier show pour Louis Vuitton sur un Pont Neuf privatisé avait de faux airs de couronnement.
Les excès enfin, d’une classe dominante d’ultra-riches dont le vestiaire élitiste surnommé Quiet Luxury, se mue en comble du chic aux 4 coins des feeds TikTok, ou d’un film hollywoodien qui rhabille la planète en rose des pieds à la tête pour les simples bienfaits de sa promotion.
Bref, une industrie de la mode qui, une fois n’est pas coutume, repousse les limites de l’entendement pour faire toujours de bruit, petit ou grand, quand ce n’est pas les drames - comme la mort de Davide Renne ou les adieux de Sarah Burton qui se tâchent de faire triste évènement.
Mais, comme la mode n’a de cesse de le rappeler, le spectacle continue.
La mort de Paco Rabanne
Alors que le fashion month pour l'automne-hiver 2023-2024 venait de commencer, le monde a appris le décès de Paco Rabanne. Le designer d'origine espagnole avait été un pionnier de la mode futuriste qui avait fait des émules dans les années 60.
De ses créations avant-gardiste, l'histoire de la mode a déjà retenue ses robes en sequins ou celles qui allient anneaux métalliques et plaques en Rhodoïd.
Comme pour lui rendre hommage, la collaboration avec sa maison - devenue Rabanne - et H&M a été l'une des plus attendues de l'année et a confirmé la place unique qu'il a su occuper dans la mode jusqu'à son décès le 3 février 2023.
La mi-temps de Rihanna au Superbowl
Quand Rihanna assure la mi-temps du Superbowl à grands renforts de tubes iconiques -et en profite pour dévoiler sa seconde grossesse surprise-, c’est forcément dans une tenue à l’image de son style flamboyant.
Au programme ? Un total look rouge incandescent signé Loewe composé d’une combinaison d’inflexion street et d’un bustier moulé en guise de top, le tout accessoirisé d’un manteau XXL de la maison Alaïa, des sneakers MM6 Maison Margiela x Salomon Cross Low et une paire de Messika en guise de boucles d’oreilles.
Le quiet luxury, la tendance de l'année
C’est le mot qui, dans une Amérique de l’athleisure et de la logomania assumée, n’a pas manqué de révolutionner le vestiaire contemporain.
Popularisée par l’ultime saison de la série HBO Succession, ce terme que l’on peut traduire sommairement par “luxe discret” renvoie à la manière élégante et non-ostentatoire avec laquelle les grands de ce monde se vêtirait chaque matin, privilégiant des matières nobles, des silhouettes d’ascendance bourgeoise et des marques patrimoniales au bling-bling made in Tik Tok.
Une esthétique résolument élitiste qui a rapidement gangrené la toile, le tout boostée par les tenues ultra-médiatisée d’une Gwyneth Paltrow en procès et celles d’un Sofia Richie qui a profité de son mariage pour dégainer tout une série de look au chic effortless.
Le sacre de Schiaparelli
Encore et toujours, les environs des défilés de mode se transforment à chaque fashion week en véritables cirques à paparazzis et plus encore avec leurs invités ultra bankable qui rivalisent d’imagination pour se faire à tout prix remarquer.
Et cette année la palme revient à Kylie Jenner qui a cassé les internets lors de la semaine de la mode haute couture avec sa robe Schiaparelli, dont la tête de lion brochée faisait preuve d'un réalisme effrayant. De quoi réjouir (non) les défenseurs de la cause animale qui y voient une certaine forme d’apologie du braconnage.
Une certaine vision de l’enfer mode donc, que la chanteuse Doja Cat a décidé d’incarner de manière très littérale avec un maquillage rouge la couvrant des pieds à la tête, l’intégralité de son corps ayant été de surcroît couvert de 30 000 cristaux Swarovski afin de prolonger sa jupe Schiaparelli incrustée de pierres.
Quant à la reine Cardi B, c’est dans une robe architecturale rehaussée de plumes et autres tenues extravagantes que l’artiste a réveillé une fashion week parfois assoupie.
Les tenues de Beyoncé au Renaissance Tour
Longue vie à Queen B ! À l’occasion de la dernière tournée d’ores et déjà mythique de Beyoncé, le Renaissance World Tour, ses concerts organisés 4 coins du monde se sont mués en véritables défilés de mode, la superstar ayant enchaîné des tenues de scène plus audacieuses les unes que les autres.
L’une des plus commentées ? Ce look Loewe, dont les mains gantées en trompe-l'œil s’inscriraient dans l’esthétique "Renaissance" de l'album (vous l’avez ?), en faisant référence au langage corporel d'une peinture extrêmement populaire de cette époque : "La Naissance de Vénus" de Sandro Botticelli.
Vous avez dit capillotracté ?
La revanche de Barbie
Machine de guerre hollywoodienne aux velléités féministes, le film Barbie de Greta Gerwig fut sans nul doute le fashion film de l’année.
Outre les épatants costumes du film recréant les looks emblématiques de la plus célèbre poupée de l’histoire et de sa bande de copines aux styles bien singuliers, le long-métrage mené par une Margot Robbie plus vraie que nature a généré une véritable vague rose sur le vestiaire estival.
Rétrograde pour certains, pop et fun pour d’autres, la teinte girly par excellence a littéralement envahi les vestiaires des adultes, pour le plus grand plaisir des enfants.
Le premier défilé de Pharell William pour Louis Vuitton Homme
C’était sans nul doute le défilé le plus attendu de l’année. En juin dernier, Pharrell Williams s’offrait un baptême de feu sans précédent dans l’histoire de la mode masculine avec la présentation de sa première collection pour Louis Vuitton.
Privatisation du Pont Neuf dans son intégralité, front row 5 étoiles avec entre autres Beyoncé, Jay-Z et Rihanna, performances live d’une chorale américaine ou encore malles présentées sur des voiturettes de golf ambulantes : ce défilé aux allures de sacre triomphant a dévoilé une collection prodigieuse revisitant les archives du malletier sur un mode urbain assumé. Un grand moment.
Le décès de Vivienne Westwood
Certaines premières fois sont plus difficiles que d’autres. Pour le show qui a suivi la disparition de la créatrice britannique, Andreas Kronthaler, mari et partenaire de création de Vivienne Westwood, a décidé de présenter une collection qui rend hommage à celle qui révolutionna la mode en un peu moins d’un demi-siècle.
Sur un ton moins endeuillé que résigné, le défilé a donné à voir des pièces en tartan extravagantes, des silhouettes à la taille structurée et des corsets revisités tandis que Cora Corré, la petite-fille de Vivienne Westwood, a clôturé le show dans une robe de mariée que son aïeule n’aurait pas reniée. La boucle était bouclée.
Le défilé de Jacquemus à Versailles
Après les champs de lavande, de blé ou les plages polynésiennes, le petit prodige de la mode française s’est attaqué à un autre monument du patrimoine français : la royauté ! Et c’est dans les sublimes jardins du grandiloquent Château de Versailles, que Simon Porte Jacquemus a mis en scène un vestiaire aristocratique réinterprété, convoquant robes bouffantes, bloomers pastel et autres signes distinctifs de sang bleu sur un catwalk digne de la cour du roi Soleil. Jouant volontiers avec des influences et codes anachroniques, il s’est même autorisé des incursions dans les vestiaires de Lady Di et de Marie-Antoinette pour une allure royale taillée pour les réseaux sociaux.
Les adieux de Sarah Burton chez Alexander McQueen
Directrice artistique de la maison Alexander McQueen pendant plus deux décennies, l’annonce du départ de Sarah Burton en septembre dernier a fait l’effet d’un cataclysme dans le monde de la mode.
Et pour cause, celle qui fut le bras droit et l’amie fidèle du défunt créateur avait repris le flambeau de façon remarquable en 2010, juste après le suicide de ce dernier.
Créatrice de talent, elle avait su perpétuer l’héritage avant-gardiste du couturier britannique tout en le twistant de sa propre empreinte artistique, entre virtuosité technique, savoir-faire couture et audace stylistique.
Visionnaire, elle a su également guider la marque en faveur de transitions durables tout en restant fidèles à l’esthétique mi-romantique mi-gothique qui a su pendant 20 ans dominer de manière intemporelles les tendances contemporaines.
Elle est remplacée par Sean McGirr, un styliste irlandais qui a fait notamment ses armes chez Dries Van Noten et Uniqlo
Le retour de Phoebe Philo
Chose promise, chose due.
Après six années d’attente, les inconditionnel.les de la créatrice britannique et ex-directrice créative de Céline ont pu découvrir le 30 octobre dernier les premières pièces de sa marque éponyme, soutenue par le groupe LVMH.
Robes déstructurées, manteaux en peau retournée XXL, souliers conceptuels et lunettes de soleil dans l’air du temps : Phoebe Philo a su retranscrire son empreinte créative sur des pièces à l’aura singulière, bénéficiant sans surprise d’un succès immédiat.
À peine mise en ligne, les pièces vendues exclusivement sur son eshop se sont retrouvées sold-out en seulement quelques jours.
Un mercato mode étourdissant
Au sein des grandes maisons, les directeurs artistiques se suivent et ne se ressemblent pas, ces derniers peinant parfois à jouer les prolongations au point de voir leurs contrats de plus en plus écourtés.
C’est le cas par exemple de Ludovic de Saint Sernin qui n'a fait qu'une seule collection pour Ann Demeulemeester. Il a également été annoncé le 1er décembre que Matthew Williams quitterait son poste chez Givenchy début 2024 après trois années balbutiantes avec la maison de couture française.
Quant aux nominations, Sabato De Sarno, précédemment chez Valentino, a été annoncé dès janvier pour succéder à Alessandro Michele en tant que nouveau directeur créatif chez Gucci, proposant aussitôt une nouvelle identité stylistique tout en sobriété.
Plus tragique, la nomination de Davide Renne chez Moschino pour remplacer Jeremy Scott s’est soldée par l’annonce du décès du créateur toscan le 10 novembre dernier. Il avait 46 ans.
Le soutien-gorge à faux tétons de Kim K.
Difficile de faire le bilan mode d’une année mode sans mentionner Kim Kardashian qui une fois encore, n’a pas manqué de se faire remarquer.
Son dernier fait d’arme ? Le lancement du soutien-gorge Ultimate Nipple de sa marque SKIMS, un soutien-gorge à armatures équipé de tétons pointus intégrés afin de donner la sensation que notre poitrine pointe sous n’importe quel t-shirt.
Et comme si ce simple argument n’était pas suffisamment gênant, l’influenceuse reconvertie en femme d’affaires a promis que ce soutien-gorge contribue à lutter contre le réchauffement climatique, 10 % des bénéfices générés par les ventes étant reversés à l’association 1% For The Planet, réseau mondial regroupant des milliers d’entreprises et d’organisations environnementales.