La sensibilité aux infections respiratoires virales, comme le virus du Covid-19 ou la grippe, varie considérablement selon les individus, allant d’une infection asymptomatique à une infection pulmonaire grave, voire un décès.

La grippe, par exemple, se manifeste généralement par l’apparition de fièvre, de douleurs musculaires et articulaires, de maux de têtes, de sentiment de malaise et de signes de difficultés respiratoires : toux sèche, gorge irritée, rhinite, rappelle l’Institut Pasteur. Elle reste d’ailleurs l'une des épidémies les plus répandues, touchant deux à six millions de personnes chaque année en France, comme le rapporte le site du gouvernement.

Depuis plusieurs années, les chercheurs s’intéressent aux interactions entre le microbiome intestinal, en tant que système nerveux, et le reste du corps humain. Le microbiote intestinal est aujourd’hui considéré comme un organe à part entière, si bien qu'un déséquilibre de celui-ci "est susceptible d’être à l’origine de diverses pathologies, dont certaines pathologies respiratoires". 

Les chercheurs commencent même à envisager "une implication de l’axe intestin-poumon, car certains patients infectés au Sars-Cov-2 développent également des symptômes de troubles gastro-intestinaux", rapporte l’Université de Rennes.

C’est pourquoi des scientifiques de l’université d’État de Géorgie aux États-Unis ont émis l’hypothèse que la composition du microbiote intestinal pouvait jouer un rôle dans le développement de maladies virales respiratoires et ainsi avoir un impact sur le système immunitaire. Dans une étude, qui vient d'être publiée dans la revue Cell Host & Microbe, les chercheurs ont étudié le lien entre certaines espèces microbiennes présentes dans les intestins et le développement de ces infections respiratoires.

Les bactéries filamenteuses segmentées protègent contre les infections respiratoires

Les bactéries filamenteuses segmentées (SFB) sont des bactéries qui "colonisent l’intestin de nombreuses espèces et probablement aussi celui de l’Homme, sans provoquer de maladies : elles sont nécessaires à la maturation de la barrière immune intestinale", selon l’Inserm.

Les chercheurs ont réalisé des tests sur deux groupes de souris, l’un présentant ces bactéries spécifiques dans le microbiome intestinal et un groupe de souris témoin. Ils ont ensuite mesuré la charge virale dans leurs poumons, plusieurs jours que les groupes aient été infectés.

Les chercheurs ont découvert que chez les souris présentant des différences dans le microbiome - lorsqu’il y avait la présence de bactéries filamenteuses segmentées - les macrophages alvéolaires étaient modifiés pour résister à l’infection et désactivaient le virus de la grippe et la signalisation inflammatoire. Ceux-ci "désactivaient le virus" en activant un composant du système immunitaire appelé "système du complément". Les macrophages alvéolaires jouent un rôle important pour ce qui est d'induire des réponses immunitaires visant à tuer les pathogènes et à combattre l'inflammation pour limiter les dommages aux poumons, explique le Centre universitaire de santé McGill.

De fait, la charge virale mesurée différait en fonction de la nature du microbiome des différents groupes de souris. Ils ont fini par conclure que la présence de cette bactérie protégeait les rongeurs contre une infection virale respiratoire.

"Nous émettons plutôt l’hypothèse que la composition du microbiote intestinal influence largement la prédisposition aux infections par les virus respiratoires", a déclaré le Dr Andrew Gewirtz, co-auteur principal de l'étude et professeur Regents à l'Institute for Biomedical. Sciences à l'État de Géorgie, dans un communiqué de presse.

Un futur moyen de traiter les maladies respiratoires ?

"S'ils sont applicables aux infections humaines, ces résultats auront des implications majeures pour l'évaluation future du risque d'évolution d'un patient vers une maladie grave", a déclaré le Dr Richard Plemper, co-auteur principal de l'étude, professeur Regents et directeur du Center for Translational Antiviral Research de l'État de Géorgie.

Le Dr Gerwitz estime très improbable "que les bactéries filamenteuses segmentées soient le seul microbe intestinal capable d'avoir un impact sur le phénotype des macrophages alvéolaires et, par conséquent, sur la prédisposition aux infections virales respiratoires". 

Selon lui, la composition du microbiote intestinal peut non seulement "influencer la gravité de l’infection virale respiratoire aiguë, mais peut également être un déterminant de la santé à long terme après une infection virale respiratoire".

Des études complémentaires seront donc nécessaires pour vérifier cette piste et trouver une façon d’améliorer la prise en charge des infections virales respiratoires.