Dans les airs aussi, "la honte doit changer de camp". Le 14 février 2025, la journaliste Marie Dupin a publié sur Radio France une enquête révélant des faits de harcèlement et d’agressions sexuelles au sein de la compagnie aérienne Air France.
À la suite de cette publication, l’entreprise a annoncé, ce 19 février, prendre des mesures afin de lutter contre les violences sexistes et sexuelles.
Sanctions et sensibilisation
Dans une déclaration transmise à l’Agence France-Presse (AFP) et relayée par le Huffington Post, la compagnie qualifie ces agissements d’"inacceptables". À la suite d’une rencontre avec le ministre des Transports, Anne Rigail, directrice générale d’Air France, déclare partager "l’émotion que les témoignages relayés par la presse ont pu susciter".
"Comme je l’ai confirmé aujourd’hui au ministre des Transports, nous sommes pleinement mobilisés dans la lutte contre tout type de harcèlement et d’agissements sexistes, qui sont inacceptables", a-t-elle ajouté.
Toujours via le communiqué adressé à l’AFP et rapporté par le Huffington Post, la dirigeante assure que "la compagnie a mis en place depuis de nombreuses années un dispositif de prévention, d’accompagnement des victimes et, en cas de faits avérés, de sanctions".
Consciente des défaillances de ce dispositif, elle indique que ce dernier sera "renforcé", avec "un accent mis sur la sensibilisation et l’accélération de la formation de l’ensemble de nos personnels".
Une cellule d’écoute et d’un service dédié
Anne Rigail a également annoncé la mise en place d’une "cellule d’écoute indépendante accessible à l’ensemble des salariés 24h/24 et 7j/7", ainsi que d’"un service dédié à la lutte contre les discriminations et le harcèlement, rattaché directement au directeur des ressources humaines".
À la fin de ce communiqué, la directrice générale d’Air France insiste sur le fait que "la protection des 40 000 salariés est une priorité", rappelant que "chacun doit pouvoir exercer ses fonctions sans craindre d’être confronté à du harcèlement ou à des agissements sexistes".
"Il colle son sexe contre mon dos"
Pour rappel, l’enquête menée par Radio France fait état de plusieurs témoignages, dont celui de Mathilde, hôtesse de l’air dans la compagnie depuis plus de 20 ans.
Elle raconte avoir été agressée par l’un de ses supérieurs : "Quand j’étais en train de préparer mon matériel, je m’accroupis, il me tient avec ses mains par les hanches et il colle son sexe contre mon dos. Et sur le vol retour, pareil, j’étais en train de préparer mon matériel, il attrape ma main, puis la pose sur son sexe en érection".
Elle explique avoir ensuite fait part des événements à l’une de ses supérieures, qui lui aurait répondu : "Ah lui, avec toutes les casseroles qu'il a aux fesses, il va vraiment finir par avoir des problèmes."
Le dossier de cette affaire a été classé sans suite, informe l'enquête de Radio France.
Une impunité des agresseurs
Elle n’est pas la seule à affirmer avoir subi de telles violences. L’enquête de Radio France fait état de nombreuses histoires similaires. Caroline, l’une des employées d’Air France, évoque une culture d’entreprise "connue et valorisée".
Pour Juliette, "c’était un rêve de devenir hôtesse et d’entrer chez Air France, et ça s’est transformé en cauchemar". "Air France protège les agresseurs, pas les hôtesses", déplore cette femme, harcelée sexuellement à plusieurs reprises par des supérieurs hiérarchiques.
L’enquête évoque par ailleurs le rapport d’un audit commandé par le Comité social et économique d’Air France en septembre 2024. Celui-ci montre que la moitié des hôtesses et des stewards des longs courriers jugent leurs relations avec les pilotes "gênantes ou très gênantes". Le rapport conclut qu’il existe un "statut de toute-puissance des pilotes", qui serait "entretenu par la direction".