Dans son livre paru mercredi 9 octobre 2024, Si un jour quelqu'un te fait du mal (Ed. Stock), l'ancienne tenniswoman professionnelle, Angélique Cauchy, violée de ses 12 à ses 14 ans par son entraîneur Andrew Geddes, aborde la manipulation dont elle a été victime durant ces deux années d'horreur. 

En 2021, son agresseur a été condamné à 18 ans de prison pour "viols et agressions sexuelles" sur quatre de ses anciennes joueuses, âgées de 12 à 17 ans au moment des faits (s'étalant de 1999 à 2014).

De ces traumatismes naît une association qui lutte contre les violences faites aux enfants dans le sport et un livre "pour [son] fils. Pour qu’il ne soit ni victime ni agresseur". 

Une emprise "tentaculaire" de son entraîneur de tennis

Angélique Cauchy commence le tennis à 6 ans, dans le club à côté de chez elle, dans la ville de Domont (Val-d'Oise). À 11 ans, alors qu'elle bat tous les records et se fait remarquer, la jeune fille rejoint le club de Sarcelles - meilleur du département - et devient numéro 2 française chez les juniors.

En 1999, alors qu'elle n'a que 12 ans, elle tombe sous l'emprise de son nouvel entraîneur de tennis Andrew Geddes. À l'époque, l'homme est âgée de 33 ans. Commence alors deux années de torture pour la jeune fille déjà fragilisée par une "faille paternelle de reconnaissance et d'affection". 

"Tout tournait autour de lui et c'était la personne la plus importante pour moi au monde. Évidemment, j'ai mis du temps à percevoir que finalement, c'était quelqu'un de mauvais et qui voulait me détruire et que ce n'était pas du tout ni de l'amour, ni de l'affection", explique-t-elle à France Info.

Astrid Mezmorian, victime de l'entraîneur Andrew Geddes après Angélique Cauchy et âgée de 15 ans à l'époque des faits, confirmait, en 2023 à France Info Sport, la mainmise de l'agresseur sur ses jeunes élèves.

"Il avait un vrai mode opératoire : d'abord vous flatter en vous faisant sentir à part, puis vous dégrader en soufflant le chaud et le froid, pour ensuite se rendre totalement indispensable une fois qu'il vous a isolée. Cette personne devient tout pour vous, car il ne vous reste plus rien par ailleurs", détaille-t-elle. 

400 agressions sexuelles et viols pendant deux ans

À l'été 2000, l'entraîneur propose d'emmener Angélique Cauchy à La Baule (Loire-Atlantique). Les quinze pires jours de sa vie : la jeune fille est violée et agressée plusieurs fois par jour. Elle estime aujourd'hui à 400 le nombre d’agressions et de viols dont elle est victime de la part de son entraîneur. 

À cette époque, "pour moi, faire une fellation ou faire un coup droit, c’est exactement la même chose”, avoue-t-elle dans une vidéo pour Brut. Passé deux ans, vient le déclic, un jour où sa mère lui offre un nouveau téléphone et où elle se promet de ne plus répondre aux appels de son violeur. 

"Il y a deux périodes dans ces deux ans, il y a cette première année d'emprise totale où je suis son mini-lui, où je suis sa marionnette et son esclave sexuelle. Et cette deuxième année où je réalise et où finalement, c'est de la 'déprise'”, précise la jeune femme auprès de France Info

À la rentrée 2001, elle demande à changer d'entraîneur, avant de changer de club l'année suivante. Angélique Cauchy réalise aujourd'hui qu'elle "a davantage connu la domination, la soumission et la violence dans l’acte sexuel que le partage et la tendresse”, explique-t-elle à Brut

Elle ne parlera des agressions et des viols subis que des années plus tard lorsqu'un jour, Astrid, autre victime d'Andrew Geddes, l'appelle et lui annonce qu'elle va porter plainte. Angélique Cauchy porte plainte à son tour en mars 2014 et arrête définitivement le tennis en 2017.

"Il y avait une espèce d'omerta où tout le monde savait"

L'ancienne tenniswoman s'en veut encore aujourd'hui ne pas être parvenue à dénoncer son agresseur. “Le jour où ça s’arrête pour moi, c’est le jour où il a violé Astrid pour la première fois”, déclare-t-elle à Brut. Car au total, elles sont quatre jeunes filles à avoir été victime de l'entraineur.

Mais les violences sexistes et sexuelles sont encore tues à l'époque alors que la loi du silence règne dans le monde du sport.

“Il y avait une espèce d'omerta où tout le monde savait que ce qu'il se passait était louche. Comme les gens n'étaient pas sûrs, ils se disaient que ce n'était pas à eux de gérer, mais aux parents. Mais c'est une faute de ne pas protéger les enfants'', expliquait-elle à France Info Sport en 2023. 

Pourtant, plusieurs personnes sont témoins des violences, notamment psychologiques dont est victime Angélique Cauchy, et les autres jeunes filles. Mais "jamais personne ne lui faisait de réflexions sur ses comportements. Donc finalement, il se prenait pour Dieu”, reprend-elle auprès de Brut

Finalement, l'ancienne sportive fonde, en 2017, l'association Rebond qui lutte contre les violences dans le sport. Elle témoigne aussi de son vécu dans Si un jour quelqu'un te fait du mal. "L’histoire d’Angélique n’est pas un cas isolé. Un enfant sur sept dans le sport est victime de violences. À travers son témoignage, elle nous exhorte à écouter, croire et protéger l’enfance", peut-on lire.