1939, la mode est un monde bien lointain pour Ralph Lifschitz, né au cœur du Bronx de l'union d'immigrés-e- juif-ve-s originaires de Biélorussie. Entouré de sa sœur et de ses deux frères, il vit une enfance heureuse malgré les fins de mois difficiles : son père, peintre en bâtiment, subvient seul aux revenus du foyer.
Le jeune homme est passionné de sport et compte bien en faire son métier, si bien qu'il se rêve basketteur ou joueur de baseball. Mais son mètre 68 l'empêche de poursuivre une carrière. Il tente alors de percer dans un autre de ses domaines de prédilection, le cinéma, pour marcher dans les pas de son idole Cary Grant. Sans succès. Mais une autre figure du cinéma et du rêve américain l'inspirera : Lauren Bacall, dont il empruntera le nom pour créer Ralph Lauren.
Un autodidacte déterminé
Élève moyen à l'école, il commence des études gestion avant d'intégrer rapidement la vie active. Il devient d'abord vendeur de gants chez Brooks Brothers, puis de cravates pour Rivetz, un fabricant de Boston. Sans aucune maîtrise du stylisme ou de la création, il se met à concevoir les siennes, des modèles larges à rayures, comme celles dans les films qui ont bercé son imaginaire, et démarche lui-même des magasins, jusqu'à ce que l'un d'entre eux accepte de les commercialiser à son nom.
Quelques mois plus tard, le créateur Norman Hilton remarque ses fameuses cravates et demande au jeune homme de travailler pour lui. Ce dernier refuse, bien décidé à ouvrir sa propre boutique. Le créateur lui prête alors 50 000 dollars. À tout juste 27 ans, le jeune designer est lancé et c'est ainsi que naît Ralph Lauren.
Le polo et l'idéal américain
Aussi impensable que ça puisse paraître, Ralph Lauren n'a jamais pratiqué le polo. Et pourtant, c'est le sport qui lui inspire le nom de sa ligne de cravates, ainsi que logo de son premier label. Discipline élitiste et élégante par excellence, le polo reflète la vision idéalisée que se fait le créateur de l'Amérique : un savant mix du style BCBG de la côte Est et de celui des cowboys de l'Ouest.
Suite à l'ouverture de sa première boutique Polo by Ralph Lauren chez Bloomingdale’s à New York en 1967, Ralph Lauren lance l'année suivante une gamme de chemises et de costumes.
En 1970, à la demande de sa femme, il initie une ligne de vêtements pour femme au style masculin et c'est alors que le fameux cavalier brodé apparaît pour la première fois. Deux ans plus tard, il sort ses fameux polos à manches courtes, déclinés en 24 couleurs, qui accèdent rapidement au statut de classiques du dressing made in US. Dans la foulée, il obtient la reconnaissance en concevant la garde-robe du film Gatsby le Magnifique, en 1974.
Des classiques évolutifs
Dans les années 1980, il diversifie sa gamme et y ajoute des accessoires, puis il lance Polo Sport qui devient un succès commercial. Parmi les incontournables de la marque, des pièces aux inflexions preppy, comme la chemise Oxford col pointe boutonné, les pantalons chinos, les vestes en tweed, mais aussi les pièces d'inspiration western que sont les chemises en denim et en chambray. Que le designer ne cesse de réinventer. Car ne lui parlez pas de tendance, il dit faire de l'authentique et de l'intemporel. Il lance en parallèle sa ligne enfant, Ralph Lauren Home, et même des parfums. Un empire qui ne cesse d'évoluer et de grandir, si bien qu'en 1997, Ralph Lauren entre en bourse.
Depuis Polo en 1967, Ralph Lauren est constitué d'un ensemble de marques : Purple Label, collection luxueuse souvent présente sur le tapis rouge, Ralph Lauren Collection, qui regroupe et revisite des pièces iconiques, Polo Jeans & Co, une marque sport plus accessible... L'entreprise devient partenaire officiel du tournoi de Wimbledon en 2006 et des équipes olympiques et paralympiques américaines en 2008. En 2023, l'entreprise compte plus de 354 boutiques dans 80 pays et génère un chiffre d'affaires de 6,4 milliards de dollars. Aussi bien une référence pour la clientèle BCBG que streetwear, le cavalier n’est pas près de s’arrêter de galoper.