Exit l’elliptique et le tapis de running. Côté training au féminin, on craque désormais pour les power racks, les haltères et autres barres d’haltérophilie semi guidées.
Outre-Atlantique, on encense même les "Muscle Mummies". Nouvelle coqueluche des réseaux sociaux, ces "mamans muscles" secouent en profondeur le monde du fitness. À mille lieux des silhouettes fines jusque-là en vogue chez sportives en legging, ces héroïnes des salles modernes consacrent temps et énergie pour se construire une vraie musculature et sont fières de la montrer, malgré les clichés.
D’après l’Urban Dictionary, une Muscle Mummy serait d’ailleurs "une femme avec de gros muscles, que les autres filles regardent avec admiration". Vraiment ? "Il y a un net changement des mentalités", confirme Eva Rodrigues, coach sportive chez Episod, dont le Hub de Pigalle vient de lancer les cours d’Athletic Lift. Ce format collectif sur machines de musculation dernier cri permet de gagner en puissance musculaire de manière intelligente.
Les séances spécial femmes proposées sont prises d’assaut. "Certaines aiment venir avec des amies pour passer de bons moments ensemble. D’autres, plus pudiques, choisissent cette formule histoire de découvrir le cours. Au départ, elles craignent de ne pas y arriver. Une fois qu’elles se sont familiarisées avec le travail et les conditions, elles sont rassurées et rejoignent le cours mixte", analyse Eva Rodrigues.
Même logique de contournement des résistances à la salle de sport parisienne Klay, qui propose un format "Small group training" ou l’on peut s’entraîner avec un coach à deux, trois ou quatre copines.
"Girls can lift"
Tout se jouerait dans la tête : en réalité, la structure des séances d’Athletic lift 100% femmes est exactement la même que la formule mixte ; seule l’ambiance est adaptée.
"La playlist est plus girly, on offre des goodies en fin de session. On a édité un t-shirt spécifique "Girls can lift" (les filles peuvent soulever des poids, ndlr) dont le stock s’est épuisé très vite", s’enthousiasme Eva Rodrigues. Une fois les réticences levées, les filles s’inscrivent aux cours mixtes, où la pro se retrouve souvent avec un public majoritairement féminin. Tirages, poussées, soulevés de terre, mouvements de force… rien ne leur fait peur !
Elles sont aussi de plus en plus nombreuses dans le nouveau cours Episod "Bootcamp Strong", qui intègre un focus sur la partie haltères en sus des passages sur les tapis de running et le fitbench. "Le lifting se pratique en binôme pendant 45 minutes. On charge plus pour booster le volume musculaire ; et les femmes adorent", constate la coach, qui se réjouit de la confiance grandissante de ses congénères, mais aussi d’une bascule claire des mentalités.
Dessiner les épaules et avoir plus de dos
"Je viens du crossfit, donc je suis assez musclée ; il y a une dizaine d'années, les femmes dans mes cours semblaient penser ou me disaient clairement qu’elles ne voulaient pas être comme moi. Aujourd'hui, j'entends encore ce genre de remarques, mais j'ai beaucoup plus de messages d'envie et d'admiration", décrit l’enseignante. D’après elle, de plus en plus de filles visent clairement à acquérir du muscle. "Elles ont envie de travailler tout leur corps, plus seulement les fessiers ou les abdos ; elles veulent aussi dessiner les épaules, avoir plus de dos. Elles ont aussi compris que le muscle les rend plus performantes, plus fit", observe la jeune femme sélectionnée aux prochains championnats du monde de hyrox, un mélange d’endurance et de sport de force.
Elles apprécient la musculation car elles aiment voir leur corps changer, comparé aux 2 ou 3 ans qu'elles ont passé à courir sur un tapis, à faire de l'elliptique, du step ou du fitness.
Même constat chez les femmes qu’Eva Rodrigues coache en individuel : "elles apprécient la musculation car elles aiment voir leur corps changer, comparé aux 2 ou 3 ans qu'elles ont passé à courir sur un tapis, à faire de l'elliptique, du step ou du fitness. En faisant du squat lourd, avec des beaux mouvements, des répétitions à amplitude complète, elles constatent que leur corps se transforme en quelques mois seulement. Et ça leur plaît".
Le body building se féminise
Historiquement associée à des corps d’hommes musculeux, la quête de puissance physique dans les salles de sport change de bord. Et la tendance monte dans l’ensemble du monde occidental. Selon le Brussels Times (mai 2023), certaines salles orientées body building notent une hausse de 50% de la part de leur clientèle féminine.
Que ce soit pour se sculpter un corps parfait (traduisez : puissant et musclé), gagner en empowerment féminin ou simplement pour le fun, de plus en plus de femmes basculent du régime cardio au training poids et haltères qui promet un boost d'énergie et un bien-être global. Avec la puissance musculaire, tout est plus facile, comme l’explique Eva Rodrigues : "on arrive à pousser plus dans les jambes, donc quand on court, on se propulse du sol avec légèreté au lieu de subir notre poids de corps".
Gagner en empowerment en gagnant de la masse musculaire
Plus que la question esthétique, c’est ce gain de force qui encourage toujours plus de femmes à switcher d’univers, comme en témoignait la bloggeuse Anne Dubndidu. La fan de running se souvient comme elle dépréciait les femmes trop musclées, qu’elle trouvait manquer de féminité et même ressembler à des mecs. "Puis, j’ai commencé le sport, mon corps s’est transformé, les muscles sont apparus. Ces muscles j’en suis fière, ils sont le résultat de nombreuses heures d’entrainement, de motivation, de transpiration… de plaisir aussi", décrit-elle dans son blog.
"Ces muscles sont aussi devenus de nouveaux compagnons dans mon quotidien : ils me simplifient la vie et ont changé ma personnalité. Je peux faire tellement de choses "sans souffrir" : soulever du matériel, ma valise, porter mes courses, des cartons, supporter plus facilement la fatigue, avoir plus confiance en moi car je me sens forte". La blogueuse préfère désormais son corps actuel, plus "fonctionnel" et apprécie de ne plus avoir besoin de son chéri pour monter ses packs d’eau.
"Je me sens forte, je me sens capable de faire et d’atteindre tout ce que je veux. Ma force physique est devenue une force de caractère. C’est beau ou c’est moche ces abdos… peu importe", considère-t-elle. "Ils me permettent de courir plus longtemps, en traumatisant moins mes articulations et tant pis s’ils ne font pas "féminins"".
Faire fi de la "gymtimidation"
Les clichés ont la peau dure… Il suffit de regarder Toutes musclées, un documentaire Arte passionnant signé Camille Juza, pour comprendre pourquoi faire du sport en général, et de la musculation en particulier, prend parfois des airs de parcours de combattantes. Si le secteur de la remise en forme a évolué vers une plus grande inclusion, il faut souvent faire montre de courage pour prendre sa place dans certaines sections poids et haltères… Un comble quand on sait que les femmes représentent près de 57% des membres des salles de sport dans la plupart des régions du monde (rapport mondial 2022 de l'IHRSA). Ce phénomène porte même un nom : la "gymtidimation".
Afin de se préserver de l’intimidation éprouvée face aux hommes à gros muscles alors qu’elles essayent d’atteindre leurs objectifs, les femmes s’organisent pour prendre leurs biceps en mains de manière plus confortable. Aux quatre coins du monde, de plus en plus de salles dédiées au sexe pas si faible ouvrent. La cote, sur TikTok, du hashtag #WomensOnlyGym ne raconte pas autre chose. Un phénomène que l’équipementier Décathlon a récemment qualifié de tendance fitness à part entière. Le Brussel Times souligne par ailleurs une nette progression de la pratique du body building au sein de fameux secteur "Gym pour femme seulement".
L’entre-soi se prolonge naturellement côté réseaux sociaux. Dans le groupe Facebook "Musculation au féminin, force & self-acceptance", on s’échange aussi bien les conseils (choix entre straps ou gants, bon timing pour adopter les genouillères et la ceinture de force…) que les vidéos des progrès en tractions lestées. Giselle, 31 ans, partage par exemple sa nouvelle Home gym installée dans son garage, histoire d’inspirer ses copines bodybuildeuses ; ou détaille comment elle a réussi à enfin passer le cap des 100 kilos au squat.
Je suis musclée et pas mince. Je suis forte, plus que beaucoup de mecs, et ça me plait énormément.
Sur sa chaîne YouTube Marinette - femmes et féminisme, la journaliste Marine Périn, montre fièrement ses obliques, ceux qui "traumatisent tout le monde" quand ils sont saillants chez les femmes. Dans les commentaires de la vidéo, Adèle abonde et se félicite de faire de la muscu et beaucoup de sport de combat.
"Je suis musclée et pas mince. Je suis forte, plus que beaucoup de mecs, et ça me plait énormément. J'entends des commentaires parfois désobligeants, mais avant de faire de la muscu, quand mes formes étaient hyper féminines, j'entendais "poufiasse" , "vulgaire". Bref, ça n'allait pas non plus pour le comité de censure publique du corps féminin", déclare-t-elle. "En plus, avant j'étais au régime, triste, faible, je me jugeais méchamment. Maintenant, je mange pour nourrir ce corps en pleine santé, performant, endurant, parce qu’il en a besoin. Je me sens libérée pour de vrai".
Toute en gratitude, la jeune femme invite "toutes les filles qui se font du mal en se reprochant d'être trop vivantes, trop présentes, trop tangibles" à oser incarner leur puissance et à l’affirmer au monde. Plus qu’une attitude : un droit, comme le revendiquait, dès 1979, la chercheuse Jan Todd à l’occasion d’une interview par People Magazine : «la force devrait être un attribut de toute l’humanité. Ce n’est pas un cadeau qui appartient uniquement à la gent masculine".
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