Si l’habit ne fait pas le moine, il pourrait bel et bien se faire l’extension… De sa coupe de cheveux. C’est du moins ce que laissent penser bon nombre de célébrités, qui, sur un coup de tête ou via un sens aigu du personal branding, semblent faire de leur passage chez le coiffeur le point de départ d’une nouvelle garde-robe.

L’experte en la matière ? Kim Kardashian, qui, à chaque révolution capillaire, dégaine une nouvelle facette de sa personnalité, à grands renforts de silhouettes au style millimétré. Quand elle adopte un blond platine façon Donatella Versace, son vestiaire prend un tournant minimaliste et futuriste, misant sur des tons monochromes et des coupes épurées. À l’inverse, son retour au brun profond s’accompagne d’une réappropriation de looks plus sophistiqués signés Alaïa ou Balenciaga.

Même mécanique pour la pop star Miley Cyrus qui, après avoir coupé ses longueurs sages pour une coupe résolument punk en 2013, affiche un style un brin provocateur entre total looks en cuir, détails cloutés et crop tops révélateurs. On pense également à la chanteuse Billie Eilish, connue pour ses transformations capillaires audacieuses. Sa tendance récente à se coiffer d’un bandana porté en fichu s’accompagne d’une inclinaison prononcée pour les dégaines streetwear ultra masculines.

Du côté de la scène francophone, c’est la chanteuse Angèle qui a récemment fait de son nouveau carré blond l’alpha et l’oméga d’un style plus femme fatale que petite fille sage, à grands renforts de silhouettes néo-futuristes et de total looks noirs.

Le changement de look capillaire, le déclic pour un nouveau vestiaire ?

Et si l’on pourrait croire ce phénomène de métamorphose réservé aux grand-e-s de ce monde, il touche en réalité (aussi) le commun des mortel-elle-s. Pour Julia, graphiste tout juste trentenaire, le passage d’un brun somme toute banal à un roux profond fut à l’origine d’un véritable changement stylistique. "Après ce changement, mes vêtements beiges ou noirs me semblaient ternes. J’ai introduit des teintes plus vives, du jaune, du vert, un peu comme si ma garde-robe devait s’accorder à ma nouvelle énergie", confie-t-elle.

Une expérience que partage Charlotte, journaliste de 36 ans, qui a également ressenti le besoin de renouveler sa garde-robe après un changement de couleur. "Quand j’ai tenté le blond polaire, mes anciens looks bohèmes m’ont semblé soudainement très démodés. Je me suis mise à opter pour des pièces plus sport, des total looks noirs… D’une certaine manière, j’avais besoin de silhouettes plus fortes, un peu déconnectées des tendances du moment", explique-t-elle.

Quant à Agathe, styliste, c’est le simple fait de troquer ses longueurs brunes pour un carré court qui lui a donné envie de s’aventurer sur de nouveaux terrains vestimentaires, sans pour autant sacrifier son style habituel. "Je vais désormais me permettre des pièces un peu plus boyish, comme un costume-pantalon oversize, car ma nouvelle coupe de cheveux élance plus ma silhouette", analyse-t-elle. "J’ai aussi envie de mettre plus de bijoux, notamment des boucles d’oreilles, ou encore plus de rouge à lèvres que d’habitude", ajoute la jeune femme.

Coiffure, mode et psyché

Loin d’être un changement purement futile, ce genre de relooking d’apparence spontanée relèverait en réalité d’une mécanique psychologique et émotionnelle bien huilée. "Le lien entre coiffure et psyché est réel", confirme la psychothérapeute Alexia Balabouka dans notre article dédié à la psychologie des cheveux, soulignant qu’un "changement soudain de coiffure peut traduire un désir de rupture ou de renouveau". "Souvent, une nouvelle tête permet d’avoir une meilleure estime de soi, améliore l’image que vous avez de vous", ajoute Jeremy Zayonnet, fondateur de l’organisme de formation coiffure ZAJAC, dans le même article.

Un phénomène qui touche particulièrement les femmes dans des moments de transition de vie comme une rupture amoureuse, un deuil ou une nouvelle perspective professionnelle. "J'ai commencé à observer moi-même ce phénomène où l'on devient la personne que nos cheveux semblent refléter. À moins que l’on ne devienne davantage la personne que l'on est déjà grâce à sa nouvelle coiffure, qui reflète désormais notre moi intérieure, s’interroge la journaliste Chelsea Peng dans la version américaine de Marie Claire, après avoir elle-même changé moult fois de style capillaire… Et de style tout court.

Nouveau look : un choix individuel ou collectif ?

Pour d’autres, le choix de changer de coiffure — et par extension de garde-robe — peut être une réponse à des pressions sociétales ou à une volonté de se réapproprier son image. C’est du moins ce qu’explique la sociologue Juliette Smeralda dans son ouvrage Peau noire, cheveu crépu : l’histoire d’une aliénation (Éditions Jasor, 2014), en explorant comment les transformations capillaires sont souvent liées à des dynamiques identitaires et sociales.

Enfin, pour d’autres, ce sera tout simplement l’influence des réseaux sociaux, avec le concours des métamorphoses capillaires opérées par les célébrités susmentionnées et autres influenceuses. Des changements à la dimension virale, amplifiés par les algorithmes d’Instagram et TikTok, qui s’imposent rapidement comme un storytelling inspirant dans une société dopée à la quête de nouveauté et de réinvention personnelle.

"Conception de soi que l’on porte sur soi", comme le définissait l’écrivain Henri Michaux, le vêtement vient en effet accentuer cette définition que l’on (re)fait de soi-même, du moins d’un point de vue extérieur. "Ce n’est pas juste d’apparence", confirme Julia. "C’est comme s’autoriser à être quelqu’un d’autre !"