C’était il y a huit ans, le 16 août 2016. La nageuse chinoise Fu Yuanhui sort de son épreuve aux Jeux olympiques de Rio (Brésil). Avec son équipe, elle se hisse à la quatrième place de la finale relais 4x100 mètres. Une déception pour l'équipe partie favorite.
Au micro de la chaîne CCTV (la télévision centrale de Chine), elle semble peu à l’aise, et ses quelques mots ne passent pas inaperçus. "Je ne crois pas avoir été bonne aujourd’hui, j’ai l’impression d’avoir trahi la confiance de mes coéquipières", lance-t-elle.
Quand la journaliste lui demande si elle a été victime de douleurs, elle poursuit : "mes règles ont commencé hier, et j’étais particulièrement fatiguée. Ce n’est pas une excuse, je n’ai pas assez bien nagé aujourd’hui".
Une spontanéité pas anodine et importante dans le milieu du sport, où comme dans la société, les menstruations sont un énorme tabou.
Une prise de parole inédite saluée à l'international
Après cette phrase spontanée lancée en direct, la femme de 20 ans devient un modèle sur les réseaux sociaux et aux quatre coins du monde.
Certains l’applaudissent, estiment même qu’elle mériterait la médaille d’or, d’autres soulignent son courage de nager malgré ses règles, pensant que ce n’est pas possible, surtout à ce niveau. "Quand j’ai mes règles, je ne peux pas marcher droit ou respirer", tweete une internaute.
Les mots de Fu Yuanhui sont repris par des médias anglo-saxons tels que The New York Times et The Guardian qui saluent aussi son courage. Ce dernier rappelle que seulement 2% des femmes chinoises utilisaient des tampons en 2016, selon une étude de l'époque.
Le New York Times rappelle qu'en Chine, parler de ses règles est mal vu, et que l'utilisation d'euphémismes est courante. Ainsi, plutôt que de dire qu’on a ses menstruations, certaines expressions sont préférables : "une visite de ma tante" ou "faire une pause".
Une médaille de bronze en prime
Le monde entier la découvre ce 16 août 2016. Mais, en Chine, Fu Yuanhui est déjà connue pour son enthousiasme depuis quelques jours. Pendant la compétition, la nageuse n’a pas manqué de célébrer ses qualifications et ses exploits, dont un record personnel sur la demi-finale du 100m dos.
En découvrant le temps de sa course, une fois arrivée, elle exulte dans l’eau. Quatre jours plus tôt, le 12 août 2016, en finale du 100m dos, elle décroche la médaille de bronze, ex-aequo avec la nageuse canadienne Kylie Masse.
Après sa médaille, son nombre d’abonnés sur Weibo - l’équivalent de Twitter en Chine - est multiplié par sept. La raison ? Dès que les caméras de télévision l'approchent, Fu Yuanhui affiche un énorme sourire et partage, aussi, ses meilleures grimaces, reprises par les internautes, ravis de trouver une sportive aussi expressive.
Quelques jours plus tard, le média américain Variety va jusqu'à la qualifier de "star des réseaux sociaux chinois".
Un tabou qui tombe... doucement
Aujourd’hui âgée de 28 ans, la médaillée de Rio a quitté les bassins. Et si son visage ne fait plus l'actualité, sa prise de parole d'août 2016 est encore dans les mémoires, car il a fallu attendre quelques années encore pour que les athlètes féminines soient questionnées, fassent le choix de parler, puis que les fédérations et les médias parlent des menstruations dans le sport de haut-niveau.
En 2020, la handballeuse Estelle Nze-Minko a justement publié un texte sur le site de Règles élémentaires, débutant par ces mots : "je suis handballeuse professionnelle, internationale française. Je fais du sport de haut niveau depuis plus de 10 ans et l’on m’a posé des questions sur mes menstruations pour la première fois l’année dernière". Plus récemment, l'escrimeuse Ysaora Thibus en a également fait l'un de ses combats, comme elle expliquait dans une interview à Marie Claire.
Olympics, le site officiel des Jeux olympiques, y a consacré un article, en mars 2024, quelques mois avant le lancement des JO de Paris. Preuve que le sujet est plus qu'essentiel, mais qu'un gros travail est encore à mener quant à l’impact des menstruations sur les sportives et sur leurs résultats dans des compétitions majeures.
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