Qui aurait pu prédire que notre prochaine obsession culinaire serait le bouillon ? Pourtant, ce plat n'est pas nouveau et a longtemps été présent sur les tables des foyers les plus défavorisés. Pratique, bon, plus rapide à préparer que la soupe, mais surtout économique, puisque majoritairement composé d'eau.

En préservant et en consommant les nutriments qui ont migré de l'eau de cuisson, on n'en perd littéralement pas une miette. Aurélie Biron-Paumard, diététicienne pour WW nous dit tout sur le bouillon et ses bienfaits.

Le bouillon revient à la mode

On pourrait croire le bouillon passé de mode, mais loin de là. Ils connaissent un regain d'intérêt, surtout les bouillons à base de viande et de poisson. Pourquoi ? D'une part, le régime paléolithique fait des émules : il favorise les apports en protéines. D'autre part, le besoin de renouer avec une alimentation traditionnelle, que tout le monde connaît, comme le bouillon du pot-au-feu et ceux, désormais coutumiers, de la cuisine asiatique.

Résultat, dans le monde entier, un nouveau type de restaurant est né : le bar à bouillon, comme à New York (Broth Bar, Brodo), Londres (Bone Tea) et Berlin (Broth Bonafide). Et, chez les libraires, des livres sont consacrés aux recettes bouillonnantes. Un retour réussi pour ce plat "de grand-mère". Un bouillon peut ne pas être un bouillon à la base, fait remarquer la diététicienne Aurélie Biron-Paumard. "On peut tout à fait faire un bouillon d'un reste d'un tout autre plat, ou bien de parties qu'on ne consomme pas en elles-mêmes comme les os ou têtes d'animaux."

Comme tient à le rappeler la diététicienne, nous parlons ici du bouillon maison. "Les bouillons que l'on trouve dans le commerce, ça peut être utile pour dépanner. Mais ce sont généralement des cubes de sel et de graisses, avec beaucoup d'additifs. Les bienfaits du bouillon ne concernent que les bouillons maison."

Pourquoi le bouillon est-il si bon ?

Si le bouillon est en vogue, c'est aussi parce qu'il ne ferait pas grossir et qu'il serait bon pour la santé. Qu'en disent les scientifiques ? Ils avouent leur ignorance. Selon Hervé This, chimiste et co-inventeur de la cuisine moléculaire, "la composition des bouillons de viande demeure mal connue, et les mécanismes de leur formation restent mystérieux".

En revanche, on connaît mieux les composants de la viande et des os. En supposant que ces derniers migrent vers le bouillon, on en déduit des bénéfices possibles : plein de collagène (celui-là même qui repulpe une ridule en une injection), le bouillon faciliterait la digestion, réduirait les risques d'inflammation, solidifierait os et articulations, calmerait les nerfs, régulerait les déséquilibres hormonaux et augmenterait la fertilité masculine.

Pour Aurélie Biron-Paumard, le principal avantage du bouillon est le suivant : "Comme tous les plats essentiellement composés d'eau, le bouillon est très hydratant. C'est particulièrement utile lorsqu'on est malade, par exemple", explique-t-elle. Mais la diététicienne souligne aussi le fait que consommer l'eau de cuisson avec les aliments permet de consommer tous les nutriments : même ceux qui ont fuit dans l'eau. "Et puis, continue-t-elle, c'est chaud et réconfortant", parfait pour l'hiver.

Seul inconvénient : sa cuisson lente (jusqu'à vingt-quatre heures pour le bouillon d'os). Mais il fournit moins de 10 Cal/100 g quand il est complètement dégraissé.

Une préparation dans les règles de l'art

  • Prenez de l'eau, des légumes, ajoutez si vous le souhaitez de la viande (voire juste des os) ou du poisson (têtes et arêtes), des herbes ou des épices.

  • Laissez cuire entre 30 min et 3 h sur feu doux et vous obtenez une sorte d'infusion qu'il ne reste plus qu'à filtrer (comme une camomille ou une verveine) ou non : consommer les aliments et le bouillon ensemble est préférable pour avoir plus de nutriments, rappelle Aurélie Biron-Paumard. Pendant cette cuisson, les principes actifs des éléments solides migrent vers le liquide, le parfument, le colorent, l'enrichissent de nutriments.

  • Taillez les éléments aromatiques (carotte, oignon, champignon…) en petits morceaux réguliers afin de multiplier leur surface de contact avec le liquide et optimiser la transmission des parfums. Pour les débarrasser des goûts agressifs qu'ils développent à l'état cru, vous pouvez les faire suer à feu doux pendant quelques minutes.

  • Une fois que le bouillon aura cuit à petits frémissements, laissez-le refroidir sans le bouger, pour que les impuretés tombent au fond.

  • Prélevez alors délicatement le bouillon louche par louche et filtrez-le au travers d'une gaze, afin d'obtenir un consommé limpide.

  • Si vous devez lui adjoindre des agrumes ou des herbes aromatiques, faites-le au dernier moment, juste avant le service.

Aurélie Biron-Paumard salue la multitude de bouillons possibles et imaginables. "On peut y ajouter des pâtes par exemple, ou les faire uniquement aux légumes, détaille-t-elle. Utiliser des ingrédients comme les oignons ou les poireaux donne aussi beaucoup de goût."

Comment accommoder son bouillon ?

À priori, un bouillon se sert en entrée, en lieu et place d'une soupe, seul ou enrichi de légumes, crustacés, poissons, boulettes de viande, pâtes, saucisse… Mais il connaît de nombreux autres usages en cuisine, où il apporte sa complexité de saveurs. Vous emploierez un bouillon pour déglacer le jus d'un rôti ou d'un steak, pour la cuisson des pâtes ou du riz, pour préparer une sauce, ou remplacer l'eau de cuisson d'une soupe et doper ses parfums.

Sa cuisson pouvant s'avérer longue (3 h quand il est à base d'os et de viande de bœuf ), il vaut mieux en préparer une grande quantité et le congeler. "On peut aussi le verser dans un bac à glaçons, et en ressortir un cube de temps en temps pour préparer une sauce ou saler naturellement du riz par exemple. Le bouillon est avant tout un très bon moyen de ne pas faire de gaspillage", explique Aurélie Biron-Paumard.

Si vous poursuivez la cuisson au-delà de son terme et que vous laissez un bouillon de viande fortement réduire, après refroidissement, vous constaterez qu'il est pris en gelée. Voilà encore une autre manière de le servir, l'été, mêlé à des légumes de saison cuits croquants et à des herbes fraîches. Pour lui donner du goût, inutile d'utiliser la partie noble des légumes et des herbes : servez-vous des feuilles, branches et épluchures. Le bouillon est le plat écolo et zéro déchet par excellence.